Garry Winogrand (1928-1984) photographe américain, né à New York, fils d'un père Abraham, hongrois travaillant dans le secteur de la confection de cuir et d'une mère Bertha, polonaise. Il grandit dans le quartier du Bronx.

  • En 1948, après deux ans d'études secondaires, il obtient son diplôme et s’engage dans l’armée de l’air américaine, affecté comme météorologue à Austin au Texas, à peine un an plus tard, suite à un ulcère, il est démobilisé. Bénéficiant d’une bourse d’études au titre de la « G.I. Bill », il s’inscrit aux cours de peinture à l’université « Columbia » de New York et réalise ses premières photographies.

  • En 1950, il rencontre Dan Weiner, photographe travaillant en free-lance pour des magazines, qui l'introduit dans les milieux de la presse, Garry présente près de deux cents clichés à la revue « Harper’s Bazaar » et lors du concours des jeunes photographes du magazine Life, une série, « Drama ».

  • En 1951, titulaire d’une bourse, il suit les cours photographiques de Alexis Brodovitch à la « New School for Social Research ».

  • De 1951 à 1954 il obtient un contrat au sein de l’agence photo « Pix, Inc. », et est chargé par Harper’s Bazaar de couvrir l’ouverture de la saison de 1951 au Metropolitan Opera. En 1952 il épouse Adrienne Lubeau.

  • De 1954 à 1955, à New York, il intègre l’agence photo « Henrietta Brackman Associates », en parallèle il réalise de nombreuses commandes pour les magazines « Collier’s » et « Pageant », dont trois reportages sur les boxeurs, « The Fight Game », « How It Feels to Be Champion of the World » et « What Makes Nick Run ? ».

  • De 1955 à 1956, il fait la connaissance de Lee Friedlander, marquant le début d’une grande amitié. Il découvre par l’intermédiaire de Dan Weiner « American Photographs » de Walker Evans, suite à l'ouvrage, il décide en compagnie de sa femme de réaliser son premier grand périple photographique à travers les États-Unis.

  • En 1957 il effectue un reportage à Kalamazoo dans le Michigan pour le compte de l’ « United State Information Agency », se rend à La Nouvelle-Orléans, dans l’Oklahoma, puis à Washington DC.

  • A la fin des années 1950, il cherche à arrêter la photographie commerciale pour se consacrer à une carrière personnelle.

  • En 1960, il réalise sa première exposition personnelle à l’ « Image Gallery » , le vernissage ayant lieu le jour du Nouvel An, avec ses amis Robert Frank et Lee Friedlander, ses clichés sont regroupées en trois thèmes, chacun occupant une salle, la première, la famille, la seconde, l’ouest des États-Unis et la dernière, les rues de New York.

  • En juillet 1960 , il couvre la Convention nationale démocrate, à Los Angeles.

  • En 1961, Edward Steichen, directeur du département de la photographie au « Museum of Modern Art » de New York, lui achète trois de ses tirages pour la collection du musée.

  • En 1962, sa femme le quitte avec ses deux enfants, Laurie et Ethan. Garry rencontre, John Szarkowski, le nouveau directeur du département de la photographie au « Museum of Modern Art ». La même année, il est extrêmement perturbé lors de la crise des missiles de Cuba, événement qui marque un tournant dans sa vie. Il débute une collaboration avec le photographe Joel Meyerowitz, photographiant ensemble le Midtown à Manhattan, où ils croisent Diane Arbus et Lee Friedlander.

  • « L’aspect nerveux, méticuleux, voire chaotique de ses cadrages est une approche adéquate de la vie en équilibre, entre animalité vitale et désastre morale. » John Szarkowski

  • De 1962 à 1963, il réalise de nombreuses photographies qui aboutissent à un ouvrage, intitulé « The Animals ».

  • En mars 1964, suite aux recommandations de Robert Frank, Lee Friedlander, Edward Steichen et John Szarkowski, il reçoit une bourse de la « John Simon Guggenheim Memorial Foundation » afin d'effectuer une étude photographique sur la vie américaine, il parcoure de nombreux états, réalisant des images dont certaines en 1967 sont présentées lors de l’exposition « New Documents » au Museum of Modern Art.

  • 1966, il fait la connaissance du photographe Tod Papageorge, qui devient rapidement un ami proche. Il organise dans son appartement des séminaires-ateliers privés sur la photographie.

  • En 1967, il épouse en second mariage, Judy Teller, qu'il a rencontrée en 1965. En mai de la même année, il voyage en Europe et se rend en Angleterre, en Écosse et en France, pays dans lesquels il réalise du nombreux clichés. De retour aux Etats Unis, à New York, il donne des cours à la « Parsons School of Design », puis en 1968, enseigne à la « School of Visual Arts », jusqu’en 1971.

  • Le 16 juillet 1969, au Centre spatial Kennedy, il photographie le lancement d’Apollo 11. Il se sépare de sa seconde femme.

  • Il obtient une seconde bourse de la « John Simon Guggenheim Memorial Foundation ». A la fin des années 1960, il utilise une caméra 8 mm pour filmer des séquences sur la 5e Avenue, dans Central Park et les environs de New York.

  • Au début des année 1970 Winogrand est engagé à la « Cooper Union for the Advancement of Science and Art », de New York, en tant que professeur, il fait la connaissance du photographe Henry Wessel, puis donne des cours à Boston, anime des ateliers à « Imageworks », à Cambridge et au « Kalamazoo Art Museum ».

  • En 1972, il se marie pour la troisième fois, avec Eileen Adele Hale.

  • En 1974, il enseigne à la « Yale University School of Art », à New Haven. Son premier portfolio, « Garry Winogrand », est publié par Double Elephant Press bénéficiant pour le tirage de l’aide du photographe Richard Benson.

  • En 1977, Le Museum of Modern Art publie « Public Relations », en lien avec une exposition organisée par Tod Papageorge, les tirages pour l’exposition sont réalisés par Thomas Consilvio, qui devient son tireur our toutes ses photographies destinées à être exposées, publiées ou vendues.

  • En 1978, il obtient de nouveau, une troisième bourse de la « John Simon Guggenheim Memorial Foundation », pour une reportage sur la Californie.

  • En 1980, Les éditions de l’université du Texas publient « Stock Photographs: The Fort Worth Fat Stock Show and Rodeo », mis en page par Tod Papageorge. En 1981, il voyage de nouveau et donne plusieurs conférences, son portfolio « Women Are Beautiful » est publié par RFG Publishing.

  • En 1983, il fait don de seize mille tirages de son travail et de plus de quatre cents planches-contacts, aux archives du CCP, « Center for Creative Photography ».


Garry Winogrand, élève du photographe Alexis Brodovitch, est le fils spirituel de Walker Evans, d’abord photographe en freelance au service des magazines, dès les années 1950, il renie très vite l’optimisme de rigueur et l’humanisme bien-pensant du journalisme en faveur d’images surprenantes, ambiguës et riches en détails, il est attiré par les événements grand public  et les aborde toujours sous un angle profondément personnel.

En 1955 lorsqu'il découvre l’œuvre photographique de Walker Evans et surtout « The Passengers », portraits d'anonymes pris à leur insu dans le métro New-yorkais. Il commence à son tour à réaliser une étude photographique de la vie américaine. Son projet est la rue, les piétons qu'il photographie inlassablement, pendant presque 30 ans, de manière spontanée, la complexité comme la banalité et les bizarreries de la vie urbaine.

Si il s'inscrit directement dans le sillage de Walker Evans, son intention n’est pas la même. Très vite, il cerne les limites du photojournalisme, ne cherchant pas à dénoncer une quelconque aliénation de l'individu mais c'est l'image, seulement l'image qui est au cœur de son œuvre, simplement l'esthétique du surgissement photographique, savoir à quoi ressemblent les choses quand elles sont photographiées. Une formule, énigmatique résumant son intention, celle ne pas connaître les gens, ne pas rentrer dans leur intimité, mais chercher à composer quelque chose qui ait un sens, il s'intéresse plus à une femme photographique qu'à la condition féminine. Dans son travail il conçoit la rue comme une énigme, un théâtre où tout est possible, ou tout est sujet à faire des images. Il photographie les hommes, les femmes, les foules, les inconnus et les anonymes, la rue est sa métaphore centrale, le cœur de sa vision.

Son œuvre oscille entre la joie et l’humour, la peur et le désespoir. Un  documentaire en fait d’une poésie visuelle complexe. Pour Winogrand, une photographie réussie est un «  fait nouveau », elle est distincte des faits dont elle se compose. Elle intervient en un geste singulier, puissant, dans le cours des affaires humaines. Comme pour ne pas enfermer dans un sens unique ces petits morceaux miraculeux prélevés dans le courant ordinaire des choses, il cherche en permanence à savoir  à quoi ressemblent les choses quand elles sont photographiées .

Il sillonne les États-Unis pendant les décennies d’après-guerre, laissant un panorama complet de la société, une œuvre qui s’étend de Manhattan à Santa Monica, du grand événement au détail intime, du président à la star d’Hollywood, ou encore le crochet d’une chaussure à talon sur un trottoir, tous sont dans son viseur, y voisinent avec son coup d’œil libidineux.

De Manhattan à Paris, en passant par Dallas, Los Angeles, Londres, dans un mouvement photographique où se conjuguent l'improviste, la fluidité, l'appétit, l'énergie et surtout un formidable instinct, il réalise plus de 100 000 clichés avec l'absence d'artifice, la neutralité de l'émotion, il utilise ces paramètres pour pouvoir rester libre dans son imagination.

Extrêmement prolifique, il a pourtant souvent différé la sélection et le tirage de ses images. À sa mort, survenue brutalement à l’âge de 56 ans, il laisse derrière lui plus de 6 500 bobines, soit quelques 250 000 images inédites, qu’il n’a jamais vues ainsi que des planches-contacts des années antérieures, qu'il a référencé mais jamais tirées.

Il figure parmi les plus grands photographes de ville, depuis le début de sa carrière, il met son art au service du quotidien et s’inscrit comme l'un des plus grands photographe de la « Street photography » américaine, au même titre que Walker Evans, Robert Frank, Lee Friedlander ou William Klein.

« L'extraordinaire nous attire un instant, la simplicité nous retient plus longtemps, parce que c'est en elle seule que réside l'essentiel. » Garry Winogrand

l Morocco, New York, 1955

New York, 1961

New York City 1961

Los Angeles, 1964

New York, 1964

Dealey Plaza, Dallas, 1964

San Francisco, 1964

Zoo, Central Park, New York, 1967

Au zoo de central park de New York, une famille non conventionnelle s’offre l’objectif provocateur de Winogrand, mère blanche, père noir, un chimpanzé chacun dans les bras, les deux habillés comme l’enfant sur la droite, suggérant un amalgame, année pleine de tensions politiques et sociales, on parle du « black power » et l’état de Virginie condamne le mariage mixte, cette photographie interprète et commente avec une vive ironie une période laborieuse. La gestualité donne corps à une image complexe, riche en points d’intérêt, les bras des singes accrochés aux vêtements de leurs maitres, les regards qui se croisent de manières parfaitement perpendiculaires, le poing qui serre la main de l’enfant, et l’ombre jetée par Garry sur sa prise de vue.

Café, Paris, 1969

Boston, 1970

New York, 1972

Ivar theater, Los Angeles, 1982