« Les photos sont pleines d’histoires. »

Willy Ronis (1910-2009) né à Paris, photographe français, fils d’une mère pianiste juive lituanienne et d’un père émigré juif d’Odessa en Ukraine, ayant fuit leur pays, ils se rencontrent à Paris dans une amicale d’exilés russes. Après un emploi de retoucheur en photographie dans un studio réputé, son père ouvre son propre studio sous le pseudonyme de « Roness ». Au départ Willy Ronis souhaite devenir compositeur de musique.

  • En 1932 lors de son retour du service militaire, il aide son père au sein du studio, apprenant la photographie et réalisant lui-même les tirages de ses photos. Au départ, il est peu intéressé par la photographie conventionnelle mais se passionne pour les expositions de photographies. Jeune homme, il commence à photographier sa ville et son quartier, il immortalise le 20e arrondissement avec l’aboutissement de la publication d’un ouvrage devenu culte « Belleville-Menilmontant » édité en 1954. Ses opinions politiques penchent à gauche, il photographie les manifestations ouvrières de 1934.

  • En 1936, son père meurt, le studio est vendu et la famille déménage dans le 11ème arrondissement. C’est à compter de cette date qu’il se consacre totalement à la photographie, en réalisant des reportages sur la montée du Front populaire, les mêmes idéaux le rapprochent de Robert Capa et de David « Chim » Seymour. Il a également l’occasion de rencontrer André Kertesz, Brassaï et Henri Cartier-Bresson. Mais, par rapport à la vision de ses pairs, Willy Ronis développe une véritable originalité, marquée par l’attention portée à l’harmonie chorale des mouvements de foule et à la joie des fêtes populaires. Dès 1937 il devient photographe, reporter et illustrateur indépendant, il collabore, fidèle à ses convictions, essentiellement pour la presse de gauche.

  • En 1945, après la Seconde Guerre mondiale, il entre à l’agence Rapho et, soutenu par son ami Roméo Martinez, collabore à Regards, Time ou Life. Parallèlement, il poursuit son travail personnel sur Paris qui lui vaut le « Prix Kodak » en 1947. Il devient un maitre de la photographie de la vie quotidienne, des scènes de rue, des gens, des passants, des voisins mais aussi des guinguettes des bords de Marne.

  • Willy Ronis, avec Robert Doisneau et Édouard Boubat, devient l’un des photographes majeurs de cette école française de l’après-guerre qui a su concilier avec talent les valeurs humanistes et les exigences esthétiques du réalisme poétique. Il participe dans les années 1950 au Groupe des XV aux côtés de Robert Doisneau, de Pierre Jahan et de René-Jacques, afin de défendre la photographie comme une véritable expression artistique.

  • A partir des années 60, sa carrière s’essouffle, son travail ne semble plus dans l’air du temps. Mais dès les années 1970-1980, il rebondit, parallèlement à ses activités de photographe, il consacre beaucoup de temps à l’enseignement, à l’École d’art d’Avignon, aux facultés d’Aix-en-Provence et de Marseille. Il y crée un cours d’histoire de la photographie.

  • En 1972, il s’installe à L’Isle-sur-la-Sorgue dans le Vaucluse. En 1979, il reçoit le Grand Prix national de la photographie, décerné par le ministère de la Culture.

  • En 1983, sur les conseils des photographes Guy Le Querrec et Claude Nori, il publie sa première monographie « Sur le fil du hasard » aux éditions Contrejour, lequel reçoit le « Prix Nadar » ce qui l’encourage à se entamer de nouveaux projets. Cette même année, il lègue son œuvre à l’État français.

  • En 2001, il réalise sa dernière série de photos. En 2005-2006, l'Hôtel de ville de Paris présente une rétrospective de son œuvre parisienne qui remporte un succès considérable avec plus de 500.000 visiteurs.

Willy Ronis s'est consacré aux images prises sur le vif et en noir et blanc. Jeune homme, il commence à photographier sa ville et son quartier, il immortalise le 20eme arrondissement.

« Ce qui m’a sauvé, c’est que je ne suis pas entré en photographie par vocation. Je suis tombé dedans par accident. Je ne le regrette pas puisque ce mariage de raison est devenu mariage d’amour. Mais cela m’a préservé de certains chocs psychologiques, qui m’auraient immanquablement déstabilisés si j’avais dû constater qu’une vocation profonde n’était pas suivie d’effets ou de résultats probants » Willy Ronis

Si on devait définir Ronis en trois mots, c'est Paris, la rue et humaniste. Paris d’une part car il est un grand amoureux de sa ville natale. Il y a passé l’essentiel de sa vie et a principalement photographié ses rues, ses passants, ses habitants. La rue d’autre part car contrairement à son père qui ne photographiait qu’en studio, Willy Ronis trouve justement ce lieu trop rébarbatif et préfère largement la spontanéité, la diversité et les différents paysages que lui offre la rue. Enfin humaniste car ce qui lui importe c’est la vie quotidienne, les gamins, les scènes de rue, les gens, les passants, les voisins, les bistrots du bord de Seine. Des scènes ordinaires, saisies sur le vif qui laissent transparaître une réelle poésie et une grande humanité.

Ses photographies sont des tranches de vie ordinaire. Ronis a toujours intimement lié son expérience personnelle à son œuvre en témoignant une poétique de l’universel. Il a réussi à saisir au vol les moments du quotidien, à traquer une vérité intime, à les faire exister dans leur plus haute simplicité. Il faut être un immense artiste pour laisser ainsi parler la vie, sans la trahir, sans l'exagérer, sans faire joli. Avoir été juste là, toujours à la bonne place, avec le geste prompt, c'est sans doute le secret et son art.

Il a toujours intimement lié son expérience personnelle à son œuvre, laquelle se développe et se nourrit également au contact des siens, des portraits de Marie-Anne, sa femme dont le célèbre cliché du « Nu provençal », de Vincent son fils, de ses chats, de ses amis Robert Capa et des personnalités rencontrées au cours de sa vie, Jean Paul Sartre, Jacques Prévert, et Brassai témoignent de la même poétique de l’universel que le reste de son œuvre. Il a réussi à saisir au vol les moments du quotidien, à traquer une vérité intime, à les faire exister dans leur plus haute simplicité.

« Mon autoportrait, ce sont mes photographies » Willy Ronis

Willy Ronis traque l’instant, il ne le fabrique pas, il guette le surgissement du quotidien dans son caractère le plus impromptu. Il veut montrer la société telle qu’elle est réellement. Et c’est avec un réalisme poétique qu’il savait enregistrer les instants de vie, entre les rues de Paris et ses quartiers populaires, les badauds, les enfants ou les scènes quotidiennes.

« Il faut avoir l’œil partout » Willy Ronis

Paris est pour le photographe, un spectacle de la vie ordinaire, qu’il côtoie chaque jour, il y questionne l'âme populaire en images gais ou mélancoliques, des gens ordinaires, des gestes ordinaires dans une situation ordinaire qu'il touche du doigt et de l'œil, élabore en micro-récits d’une beauté palpitante de débris et de trésors poétiques de la ville.

« J'ai fait de la photo buissonnière toute ma vie » Willy Ronis

« Je ne mets pas en scène, je négocie l'aléatoire », expliquait Ronis. Le photographe ne prémédite pas ses images, Il cherche à capter, dans ses promenades le nez en l'air, les petits bonheurs simples, modestes » Willy Ronis

Spécialiste de l'instant et du hasard, Willy Ronis traînait son appareil constamment avec lui, toujours réglé avec des paramètres « moyens » pouvant lui permettre de saisir instantanément le plus de situations possibles, ses photos s’inscrivant dans l’esthétisme du hasard. Il captait toujours un instant qui passe, simplement en humaniste afin de rendre compte lucidement du réel. Ne se laissant jamais enfermer dans une manière établie, il aimait se laisser aller au gré des rencontres, des instants dérobés. « Je suis le contraire du spécialiste, je suis un polygraphe. » dira t-il.

L’instant de grâce dans la phonographie, est ce que Willy Ronis appelait « le moment juste », la difficulté technique rencontrée, la nécessité de composer la photo comme si il faisait un petit tableau de genre, de capter la lumière par petites touches, livrant la conception de son art, ne pas chercher à reproduire le réel mais s'efforcer de le révéler dans sa vérité la plus vive, à la manière des écrivains réalistes du 19eme siècle.

« À la question qu'est-ce qu'une bonne image ?, je me contente, faute de mieux de répondre que c'est celle qui a su communiquer l'émotion qui l'a faite naître. » Willy Ronis

« J'ai toujours fait mes photos dans l'instant. Sans mise en scène. Un clic, deux, guère plus, car il ne fallait pas gâcher : les rouleaux de pellicule coûtaient cher ! » Willy Ronis

Ronis et la couleur : Willy Ronis, maître du noir et blanc, dès 1955 utilisera dès son apparition la nouvelle Kodachrome, film diapositive à la chromie si particulière, et si peu sensible à la lumière qu'il aurait dû, logiquement, l'empêcher de faire, des instantanés sur le fil du hasard, il n'en sera rien et a su tirer le meilleur parti.

« Fin 1954, j’avais commencé avec mon Rolleiflex un reportage en noir et blanc sur la semaine de Noël dans les grands magasins, ce qui me conduisit naturellement à entamer peu après des essais avec la Kodachrome, cette merveille qui malheureusement n’affichait alors qu’une sensibilité de 10 ASA » Willy Ronis

Que se soit en noir et blanc ou en couleur, il ne déroge pas à la règle qu’il s’est fixé depuis le début de sa carrière, le thème de la vie cher à Willy Ronis ne change aucunement, d’un Paris populaire et de la vie ordinaire, des lieux magnifiés d’une lumière si particulière saisie devant une boutique, sur un quai ou un boulevard. Pour Ronis, la couleur est une autre manière de voir, ni plus riche ni moins libre, elle est une façon différente de traiter la lumière qui à toujours été sa grande affaire, une autre métrique qui ne transforme pas son langage.

Ronis et le nu : Willy Ronis l’a travaillé dans son atelier secret de méditation, de poésie, de peinture, de sculpture, clandestinement pendant des années et des années sans jamais le déformer, mais le rendant simplement très beau. Il a toujours eu beaucoup d’admiration et de respect pour le corps féminin. Il le connait, le parcourt, l’exalte et le traite avec pudeur et retenue. Avec beaucoup de réalisme et de sensualité, il cueillait un moment d’abandon discret. Les femmes de Ronis sont belles parce qu'il les laisse être. Il les aime pour ce qu'elles sont, il photographie les femmes nues dans un silence qui fait parler. Dans le calme, l'intimité, la tendresse et la sérénité. Ses images de nus, dans leur extraordinaire naturel, deviennent sacrés, les femmes sont des déesses toutes simples de passage dans le vingtième siècle. Ses nus sont des partitions musicales, lui qui voulait être musicien, il l’est avec le cadrage, la lumière, les ombres, les attitudes, les gestes, ses photographies sont mélodieuses. Des scènes humbles, d’une pudeur délicate, sans grivoiserie, imprégnée d’un bonheur simple et doux, illustrant parfaitement l’approche humaine, respectueuse et bienveillante qui caractérise l’œuvre de Willy Ronis.

« Ce n'est pas tellement la lumière qui m'inspire, c'est ce que la lumière éclaire » Willy Ronis

Ronis et le Nu Provençal : En 1949 Ronis réalisera le « Nu Provençal », ce cliché deviendra l'une des plus célèbres de son œuvre, dans lequel sa femme Marie Anne, de dos, se rafraichit à l’aide d’une bassine un jour de grande chaleur, les murs s’effriter et un sol en tomette, dans leur petite maison de campagne à Gordes. Avec un contre-jour, il réalise un exploit, la lumière principale arrivant de face, une partie de la scène est éclairée et l’autre dans l’ombre. La lumière venant de la fenêtre parcoure et s’imprime directement sur le corps. Le visage est à la fois dans le sombre et se trouve éclairé par la lumière du soleil qui se reflète dans le lavabo blanc. Par le choix d’une légère plongée, Ronis répartit visuellement les éléments du décor autour du sujet, la chaise, le miroir, le volet intérieur, le pot à eau, sont autant d’éléments qui conduisent le regard sur le corps.Sa femme, il la souligne avec des courbes harmonieuses dans un jeu raffiné de noir et de blanc. Le visage ne se dévoile, elle est tournée de l’autre coté de l’objectif, en donnant le ton à la scène, à mi-chemin entre un rêve éveillé et une irrésistible envie charnelle.

« Avec ma femme, nous avions acheté une ruine à Gordes et nous avions décidé d'y passer nos vacances. Le confort était rustique, il n'y avait pas d'électricité et nous devions aller chercher l'eau à une fontaine. Un matin, alors que j'allais prendre mon petit déjeuner, j'ai vu ma femme en train de faire sa toilette. Je lui ai dit, ne bouge pas, et je suis allé chercher en vitesse mon Rolleiflex qui était sur le buffet. J'ai gravi deux marches de l'escalier qui montait au grenier. J'ai pris quatre photos. Pas une de plus. Cela m'a pris à peine une minute. L'agence Rapho la diffusée et elle est aussitôt devenue célèbre » Willy Ronis

Le « Nu Provençal » sera retenu par Edward Steichen pour l’exposition « The Family of Man » organisée au MoMA en 1955 et fera par la suite le tour du monde, devenant une icône photographique du 20eme siècle.

« La belle image, c'est une géométrie modulée par le cœur. » Willy Ronis

Rue Muller, Paris, 1934

« Montmartre, Rue Muller, 1934. C’est la nuit, j’ai travaillé sur pied, c’est rare, j’ai profité de la pluie, pour les reflets. Je préfère travailler en vitesse. Habitant non loin, j’avais repéré cet escalier. C’est une photo dans l’esprit du réalisme poétique de l’époque, on a l’impression d’un décor en studio, à la Trauner, que j’ai connu plus tard. J’ai fait un temps partie de la bande à Prévert. »

Argentan, Normandie, 1946

Place Vendôme, Paris, 1947

« C'était une fin de matinée, sur la place Vendôme. Tout à coup, je ne sais pas pourquoi, je baisse la tête et je remarque une flaque d'eau. Je me penche encore et en la regardant bien attentivement, je vois qu'un trésor se cache dans cette flaque, la colonne Vendôme s'y reflète, j'ai bien sûr tout de suite envie de faire une photo. »

« C'est un petit miracle ce reflet. Et aussitôt, une jeune femme enjambe cette flaque. Zut, je n'étais pas prêt, je l'ai ratée, j'aurais pourtant tellement voulu prendre ce geste, cet ensemble, avec la flaque, la jambe, et le reflet de la colonne. Mais quand j'ai levé la tête, je me suis aperçu que plusieurs femmes passaient par là et prenaient toutes la même direction. C'étaient les ateliers de la place Vendôme qui rejetaient leurs petites cousettes pour le temps du déjeuner. Alors j'ai attendu, trois femmes, l'une après l'autre, ont fait le même parcours et ont enjambé la flaque. J’ai fait trois photos. Cette photo est la plus belle des trois. Elle est étrange, sensuelle, avec le beau dessin de l’escarpin et l'ambiance particulière de ce jour, ou je m'en souviens, il n'avait pas cessé de pleuvoir ».

Nu dans un mansarde, Paris, 1949

Ces deux clichés dans une mansarde modeste et dépouillé au sixième étage d’un immeuble parisien, les murs s’effritant sur un sol en tomette. La pose de la jeune femme s’inscrit dans la grande tradition des peintures du 19eme siècle, connues et appréciées de Ronis. Il revisite en photo « la femme au perroquet » de Gustave Courbet, représentant une femme étendue sur un lit défait.

Il cueille un moment d’abandon discret d’une femme, les mains derrière la tête et les cheveux défaits qui tombent à terre, le modèle se donnant explicitement et tout entier au photographe. Les draps foncés sur lesquels la femme est allongée soulignent les courbes harmonieuses de son corps pâle dans un jeu raffiné de noir et de blanc.

Nu dans un mansarde II, Paris, 1949

Nu Provençal, Gordes, 1949

Avenue Simon Bolivar, Paris, 1950

« Cette photo, je l'ai faite en 1950. J'étais là, dans cet escalier, j'attendais quelque chose, parce que je voulais qu'il y ait un peu de monde qui passe. À un moment donné, j'entends une voix de femme derrière moi, qui parlait à son enfant, qu'elle tenait dans ses bras. J'ai attendu qu'elle me dépasse, et miracle, miracle qui arrive quelquefois dans la photographie, quand elle est arrivée en bas, est passé cet attelage étonnant - car même en 1950 il n'y avait plus tellement d'attelages avec des chevaux. Et ce qui est amusant, c'est qu'il y a en même temps cet ouvrier municipal, qui en train de réparer ses feux tricolores, et des femmes qui promènent leurs enfants dans des poussettes derrière. Et puis le petit cordonnier qui parle avec le client. Et le petit chat noir, en bas de l'escalier. C'est une photo pleine d'histoires ! »

Les Forges, Renault Boulogne Billancourt, 1950

Horloger, entre la place d'Aligre et la rue de Charenton

Paris, 1952

Le Petit Parisien, 1952

Willy Ronis, qui devait illustrer un reportage intitulé « Revoir Paris », cherchait une façon particulière de photographier un pain parisien. Ronis raconte comment il a réalisé cette photo : « Il était midi, je suis allé dans mon quartier rôder du côté d'une boulangerie. Dans la queue, j'ai vu ce petit garçon, avec sa grand-mère, qui attendait son tour. Il était charmant, avec un petit air déluré. J'ai demandé à sa grand-mère : S'il vous plaît, madame, est-ce que vous m'autoriseriez à photographier ce garçon quand il sortira avec son pain ? J'aimerais bien le voir courir avec son pain sous le bras. Mais oui, bien sûr, si ça vous amuse, pourquoi pas ? »

« J'ai pris cette photo, car pour moi, elle représente bien la vie quotidienne, c'est à dire que ça me rappelle moi quand j'allais cherche la baguette de pain, et que c'était la première fois que j'y allais seule, donc j’étais aussi heureux que l'enfant... C’était ma première responsabilité. C'est en cela que la photographie humaniste est universelle, elle évoque à chacun des moments de la vie. »

Deena de dos, Sceaux, 1955

Galeries Lafayette, Paris, 1955

Champs de Mars, Paris, 1956

Gordes, 1957

Les amoureux de la Bastille, Paris, 1957

Au cours d’une de ses balades dans Paris, Willy Ronis monte au sommet de la colonne de Juillet. Après avoir pris quelques photos, il aperçoit un couple contemplant les toits de Paris, qui lui tourne le dos. Il prend vite une photo, en catimini, puis redescend, ce cliché par la suite deviendra une des plus célèbres du photographe.

Usine métallurgique, Lorraine-Escaut, Sedan, 1959

A Belleville, au coin de la rue Piat et Vilin, 1959

La Péniche aux enfants, Paris, 1959

« La plus énorme émotion de ma vie, c’était en 1959 quand j’ai fait à l’arraché la photo de la péniche aux enfants au Pont d’Arcole, sans être sûr que je l’avais réussie car ça défilait sous moi, et c’est une photo que je ne pouvais pas répéter. Si j’avais appuyé un dixième de seconde trop tard, c’était foutu. »

Les adieux du permissionnaire, Paris, 1963

Ce jour là, il surprend derrière le rideau de la fenêtre d'en-face de chez lui deux amoureux qui vont se séparer. Il avoue avoir eu des « scrupules », mais il attrape pourtant son appareil, et à son retour les amants n'ont pas bougé, toujours serrés l'un contre l'autre, comme un voyeur il se tapit dans l'ombre pour saisir cet instant d'un bonheur triste.

Un dimanche au Louvre, Paris, 1968

Rose Marie, 1971

Cette femme au maillot marin semble être nulle part et partout, sur fond blanc très légèrement ondulé, sable ou océan, sans limites, c’est la libération des seins, l’affirmation puissante, la négation de tous les voiles, volonté de la tête emmitouflée le temps d’enlever un doux et confortable vêtement de coton. Le buste au maillot marin est la plus surréaliste et classique des photos de Ronis, les seins, le nombril, le mouvement brusque et l’immobilité stable sont comme un miracle qui semble exister. Les rayures du maillot sont signées par l’apparition incurvée des deux côtes. Cette photo de Ronis est l’emblème historique de la vraie libération féminine, c’est une victoire. La photo en tout point révolutionnaire comme celle que le photographe a réalisé pour son premier reportage en juillet 1936 de la petite fille du front populaire, coiffée d’un bonnet phrygien, sur les épaules de son père levant le poing.

Nu Villa Médicis, 1981