Raymond Depardon (1942) photographe français, né à Villefranche-sur-Saône, issu d'une famille d'agriculteurs.

  • En 1954, à l’âge de 12 ans il s’intéresse à la photographie et s'approprie l'appareil de son frère, un 6x6 de marque Lumière, il prend ses premiers clichés et effectue lui même ses tirages.

  • En 1956, après l'obtention de son certificat d'étude, son père lui offre en cadeau un appareil d'occasion et il installe un petit laboratoire photographique dans la ferme de ses parents, tout en étant apprenti dans une boutique de photo-opticien à Villefranche-sur-Saône.

  • En 1957, il s'inscrit à des cours par correspondance d'opérateur photographe. Un an plus tard en 1958, il rejoint Paris, s'y installe et devient l'assistant du reporter photographe, Louis Foucherand.

  • En 1959, suite à l'association de Louis Foucherand avec Louis Dalmas qui fondent ensemble l'agence « Dalmas ». Dès 1960 Raymond Depardon intègre l'agence en tant qu'employé de laboratoire et pigiste, à force de persévérance, à dix-huit ans, Dalmas lui confie, avec 800 francs en poche, un reportage au Sahara afin de suivre l'expédition SOS-Sahara, mission militaire française partit dans le désert algérien pour y étudier la résistance du corps humain à la chaleur.

  • Il réalise des photos en noir et blanc de trois hommes égarés dans le désert et décroche sa première publication au sein du magazine « Paris-Match », dont l'une fait la couverture et les autres un cahier intérieur de quatre pages. Ce reportage le propulse au somment, il devient immédiatement reporter salarié au sein de l'agence Dalmas, il couvre les conflits, ceux de l'Algérie et du Vietnam, mais aussi les sujets d'actualité, les faits divers et traque les vedettes comme un paparazzi.

  • En 1964, il couvre ses premiers Jeux olympiques à Tokyo. En 1966, il crée l'agence « Gamma » avec quatre autres photographes dont Gilles Caron. En 1968, il est à nouveau présent pour les Jeux olympiques de Mexico.

  • En 1969, il réalise son premier documentaire, intitulé « Ian Palach », un court métrage consacré un an après la répression du Printemps de Prague, à un jeune tchèque suicidé par le feu.

  • En 1972, à Munich, lors des Jeux Olympiques, des terroristes palestiniens du groupe « Septembre noir », pénètrent dans le village olympique et prennent d’assaut le bâtiments des athlètes israéliens, la prise d'otage se solde par la mort de onze membres de la délégation sportive, Raymond Depardon fait alors l'une de ses plus célèbres images, celle d'un terroriste cagoulé sur le balcon.

  • En 1974, suite à la demande du jeune candidat à la présidence, Valéry Giscard d'Estaing, il tourne son premier long métrage sur sa campagne électorale, « 1974, une partie de campagne » qui ne sort en salles qu'en 2002. La même année, il réalise un second documentaire, « Les Révolutionnaires du Tchad » qui contribue trois ans plus tard en janvier 1977, à la libération de l'otage, Françoise Claustre détenue durant plus de 1 000 jours par les rebelles tchadiens.

  • En 1977, il réalise son deuxième long métrage, « Numéros zéro » sur le lancement du quotidien « Matin Paris ».

  • En 1978, il quitte l'agence « Gamma », photographie la guerre civile au Liban et en Afghanistan, il publie un ouvrage, intitulé « Notes » et tourne un nouveau documentaire sur l'hôpital psychiatrique de Venise, « San Clemente ». En 1979, il rejoint l'agence Magnum Photos.

  • En 1981, son long métrage, « Reporters », consacré au métier de reporters, qu'il filme caméra à l'épaule, sans aucun commentaire, obtient le César du meilleur documentaire et reste plus de sept mois à l'affiche au cinéma « Quartier Latin ».

  • En 1984, il photographie à la chambre et en couleur les lieux de son enfance à Villefranche-sur-Saône. En 1986, « New York, NY » obtient le César du meilleur court métrage.

  • En 1987, il épouse la productrice et réalisatrice, Claudine Nougaret, avec laquelle il tourne « Urgences » à l’Hôtel-Dieu.

  • En 1989, il tourne « La Captive du désert » avec la toute jeune actrice Sandrine Bonnaire, interprétant le rôle de l'archéologue Françoise Claustre retenue en otage au Tchad, le film obtient en 1990, six nominations au festival de Cannes.

  • En 1991, il reçoit le « Grand Prix national de la photographie », décerné par le ministère de la Culture. En 1995, il est récompensé à nouveau du César du meilleur avec son documentaire, « Délits Flagrants », tourné dans les bureaux de la 8ᵉ section du Palais de justice de Paris.

  • En 2000, la Maison européenne de la photographie, lui organise sa première grande exposition, intitulée, « Détours ».

  • En 2003, il obtient l'autorisation de tourner son documentaire au tribunal correctionnel de Paris, « Instants d'audiences », présenté au festival de Cannes en 2004.

  • En 2006, il est directeur artistique des 37eme Rencontres Internationales de la photographie d'Arles.

  • En 2010, ouverture de l'exposition à la Bibliothèque nationale de France (BNF), « La France de Raymond Depardon ».

  • En mai 2012, après l'élection de François Hollande à la présidence, il réalise son portrait officiel pour le quinquennat.

  • En 2017, son documentaire « 12 jours », titre faisant allusion au délai introduit par la loi concernant l'internement psychiatrique sans consentement, est présenté au 70eme festival de Cannes.

« Il faut aimer la solitude pour être photographe. » Raymond Depardon

Raymond Depardon, a plus d'une flèche à son arc, photographe, réalisateur, journaliste, scénariste, il est l'un des plus grand documentariste français avec un style direct, transparent, dépouillé, ses films sont un engagement total, il cherche à changer la face du monde.

Il touche à tous les genres, en portant son regard humaniste sur le Tchad aussi bien que sur les asiles psychiatriques, aux urgences hospitalières, pénètre les palais de justice, explore ses origines du monde paysan avec les problèmes qu'il engendre et s’intéresse à la photographie politique, qui selon lui, l'age d'or se situe entre mai 1968 et 1982, en étant l'ère de « la photo de contact ». Photographe empathique, il traite avec la même passion l’ordinaire et l’exceptionnel.

« Jamais ne s’arrête l’idée d’une photographie, d’une image à faire, la mémoire d’une lumière, la surprise d’un cadre, jamais de repos pour la quête d’un bonheur photographique. » Raymond Depardon

Son travail repose sur le talent, l'intégrité, l'énergie et la force, un des traits les plus caractéristiques de son œuvre est la revendication de la subjectivité, avec une volonté de photographier des « temps morts », ce qui le détache de l'école du reportage humaniste à l'européenne de Henri Cartier-Bresson, son travail se rapproche plus de l'école américaine, des photographes tels que Walker Evans ou Robert Frank.

« Il faut être agressif avec soi-même et discret avec les gens qu'on photographie. » Raymond Depardon

Sa photographie respire la curiosité, est pleine d’énergie et est le résultat de penser différemment, il la mène sur une multitude de fronts, démultipliant les sujets, les approches et les esthétiques.

Il sait trouver la bonne distance pour capter la souffrance humaine, il est attiré pour l'enfermement. Toute sa carrière il déroule les thèmes qui lui sont chers, ceux de la justice, de la prison, de la psychiatrie, et des hôpitaux.

« Plutôt que témoin, je me sens davantage passeur. Les témoins sont rarement optimistes pour l’avenir. Moi je veux passer le relais. Au fond, je suis un passager de mon époque. » Raymond Depardon

Il hésite toujours longuement avant de prendre une photo, quelle soit soit en couleur ou en noir et blanc, réagit d’une manière impulsive à un choc visuel qui pour lui devient une bonne image, une sorte d’entre d’eux ou l’intime apparait au coin d’une rue ou dans un visage. Il construit ses clichés en quelque chose de cinématographique, mêle la photo au documentaire, avec une vision très claire du réel, sans aucun filtre émotif, conservant une distance pour éviter le piège de la dramatisation. Ses vues sont généralement verticales pour mieux éviter le blanc dans les ouvrages.

« J’ai été en colère, je suis resté trop longtemps en silence, en résistance, en lutte contre la lumière, contre l’icône qui ne venait pas et que tout le monde attendait. J’ai raté beaucoup de choses. Mes photos ne sont peut être que des ratages, mais quelle chance ! Les photos réussies, c’est terrible. » Raymond Depardon

Il couvre pour la première fois les JO en 1964 à Tokyo, puis ceux de Grenoble en 1970, à Montréal en 1976, en captant la joie, l’effort sur les pistes, les tapis ou les bassins comme le suspense ou la liesse dans les tribunes. Il est à travers ces jeux, le témoin de la grande Histoire, comme celui du poing levé des athlètes afro-américains à à Mexico en 1968, la placidité satisfaite de Leonid Brejnev à Moscou en 1980, il photographie tous ceux qui, pour le meilleur ou pour le pire, participent à la grande geste olympique.

« le sport est peut-être la spécialité qui apprend le mieux à bien voir. Un photographe de sport est armé pour s'aventurer sur n'importe quel autre terrain. Au bord des stades olympiques, j'ai un peu eu l'impression de devenir moi-même un athlète. Avant une grande course ou un grand concours, je ne mangeais plus, je ne buvais plus, je ne parlais plus. » Raymond Depardon

« Le réel possède un avantage considérable sur la fiction, c'est d'être unique. » Raymond Depardon

Brigitte Bardot, 1960

« En fils de paysan pas trop informé à l’époque, pour moi il y avait deux personnes qui dominaient tout à cette époque-là, le Général De Gaulle et Brigitte Bardot. Un jour, je suis tombé sur un article, Jacques Charrier était hospitalisé dans une clinique de Meudon. C’était un jour férié, j’y suis allé seul. Brigitte Bardot est arrivée en voiture décapotable. Elle portait son fameux foulard à carreaux. J’ai pris quatre photos qui ont marché, même si l’une est un peu floue. Je l’ai eu de dos. On ne s’était même pas parlé. Je regrette un peu qu’on ne se soit pas dit bonjour. J’ai foncé à l’agence Dalmas. D’ailleurs ils étaient fou de rage car comme je n’étais pas encore intégré, que j’étais juste pigiste, il devait me donner 50% des ventes. Le cliché a été publié dans France Soir. Ça m’a valu d’être repéré. Je n’étais plus anonyme, j’étais celui qui avait photographié Brigitte Bardot. » Raymond Depardon

Catherine Deneuve, La Chamade d'Alain Cavalier, 1968

François Truffaut et Jean-Pierre Léaud,

Les deux anglaises et le continent, 1971

Jeux Olympiques de Munich, RFA, 1972

Présent aux JO de la RFA, il est le témoin de la prise d’otage de la délégation israélienne, effectuant l'une de ses plus célèbres images, celle d'une silhouette cagoulée, d’un preneur d’otages sur le balcon du bâtiment des athlètes israéliens, à Munich.

Le 5 septembre 1972, aux Jeux Olympiques de Munich, le monde découvre avec effroi l'action terroriste la plus médiatique, un commando de l'organisation palestinienne « Septembre noir » prend en otages neuf athlètes israéliens dans le village olympique. Les huit terroristes parviennent à pénétrer dans les appartements occupés par la délégation masculine israélienne, tuant deux personnes lors de l'attaque, un athlète et un entraineur. Ils lancent un ultimatum à Israël afin d'obtenir la libération de plus de 230 prisonniers palestiniens. Les caméras du monde entier se tournent vers eux.

Les négociations avec les autorités ouest-allemandes, non préparées durent de très longues heures, aboutissant à la mise à disposition d'un avion pour les ravisseurs et leurs otages afin de se rendre en Égypte. Sur le tarmac de l'aéroport, la police allemande lance l'assaut, l'opération inorganisée, tourne mal, avec un bilan lourd, dix-sept tués dont onze sportifs israéliens. Pour la première fois de l'histoire des Jeux le drapeau olympique est en berne.

Ahmed Shah Massoud, Badakhshan, Afghanistan, 1978

Tibesti, Tchad, 1979

Hôpital Psychiatrique, Collegno, Turin, 1980

A la fin des années 70, l'Italie est confrontée au démantèlement progressif de ses hôpitaux psychiatriques, Raymond Depardon se rend sur la péninsule, afin de documenter ces asiles, passe de celui de San Clemente sur une petite ile de la lagune de Venise, à Arrezzo à Naples, à celui de Collegno proche de Turin ou durant plusieurs jour il s'aventure à l'intérieur, dans les couloirs et les chambres, comme cet homme qui se cache totalement replié et enfermé sous son grand manteau.

Il est esthétiquement attiré par les murs, parce pour lui, un mur ferme l’image, il pénètre cet univers poignant, glaçant, celui d'un couloir, d'une porte close ou d'une chambre vide.

François Hollande, Portrait officiel, 2012