Carla Cerati (1926) photographe italienne, née à Bergame. Jeune, elle a l'intention de devenir sculpteur, passe l'examen d'entrée à l'Académie de Brera avec succès. En 1947, sous la pression de sa famille, elle se marie à 21 ans et renonce à sa carrière, elle travaille en tant que couturière, afin d’aider son mari. Le couple s’installe en 1952 à Milan.

    • A la fin des années 50, elle découvre la photographie et cesse son métier de couturière, elle effectue ses premiers clichés dans son milieu familial et au sein du cercle de ses amis.

    • En 1960, elle débute la photographie sur les plateaux de théâtre de Franco Enriquez. Sans même savoir comment développer un rouleau de film, elle devient rapidement photographe professionnel. Au départ elle consacre son travail, particulièrement en s’intéressant aux portraits ainsi qu'aux reportages sociaux. Poussé par sa curiosité et son regard critique, elle photographie la jeunesse des années 60, les visages et les lieux des secteurs industriels, en 1066 l'inondation de Florence, et la ville de Milan en pleine mutation.

    • Ses clichés sont publiés dans de nombreux grands magazines nationaux, « L'Illustrazione italiana », « Vie Nuove », « l’ Espresso », « Du Leader » ainsi que dans des revues internationales.

    • En 1965, elle quitte Milan en voiture avec l'idée d'atteindre la pointe de la Sicile, son voyage donne naissance à plusieurs séries photographiques, « Maghi e streghe », « Sicilia, uno e due » et « Nove Paesaggi Italiani ».

    • Attirée par les visages des personnalités culturelles d'après-guerre, elle dresse les portraits de Dorfles, Umberto Eco, Salvatore Quasimodo, Lamberto Vitali et Elio Vittorini.

    • En 1968, elle réalise avec le photographe Gianni Berengo Gardin, un reportage sur les asiles, en photographiant des femmes et des hommes aux corps meurtris, abandonnés et enfermés dans leur marginalité, elle cherche à témoigner, dénoncer et lutter afin de pouvoir améliorer la société civile. Ses clichés issus de cette série, sont rassemblés dans un ouvrage, « Morire di Classe ». La même année, elle a son panthéon de la culture, dans une exposition à la galerie « Le diaphragme » de Milan, intitulée « Culturalmente Impegnati » (Engagés culturellement), présentant ses nombreux portraits, publiés par la suite dans « Fiera Letteraria », « New York Times », « Time-Life » et « Die Zeit ».

    • Au fil des ans, en tant que photojournaliste Carla est envoyée par « L'Espresso » couvrir les événements culturels de l'époque, Laura Betti au Festival du Film de Venise de 1968, Pier Paolo Pasolini à la Foire du livre de Francfort de 1974 et Andy Warhol à la Galleria Apollinaire de Milan en 1974.

    • Son engagement en Italie, ne la détourne pas pour les luttes à étranger. L'amitié avec le directeur Jacinto Esteva Grewe, rencontré à la Mostra de Venise en 1968, lui demande de parcourir l'Espagne de Franco pour photographier les visages des intellectuels de gauche qui défient la dictature. Au cours de nombreux voyages effectués entre 1969 et 1975, elle s’ infiltre dans le réseau de la résistance intellectuelle pour dresser les portraits de plus d'une centaine de personnes comme Joan Miró, Ricardo Bofill, Antonio Gades, Blas de Otero, Juan Antonio Bardem.

    • En 1973, elle entame une carrière d’auteur avec « Un Amore Fraterno » et publie plusieurs romans, tout en continuant parallèlement à photographier, s'attaque au thème du nu féminin, qu'elle regroupe dans un ouvrage de Paolo Morello, intitulé « Carla Cerati, Nudi ».

    • Dans les années 1980, elle abandonne progressivement sa profession en tant que photojournaliste, désillusionné par des mécanismes opportunistes et rapides qui dominent l'industrie. Cependant, elle continue à photographier en privé, réalise une série de projets destinés à l'abstraction et de la composition.

    • En 1982, inspirée par l'architecture, elle réalise des photographies totalement nouvelles, en changeant radicalement de style, en s'axant sur les formes géométriques et abstraites comme celles de la Muralla Roja de Ricardo Bofill à Alicante.

    • En 1996, toujours en collaboration avec Magli, elle effectue une nouvelle série de nus.


Carla aurait aimé être sculpteur, mais c’est avec un appareil photo et un stylo qu'elle s’épanouit en photographiant des visages pendant une manifestation, des bourgeois à un vernissage, des gens du nord et du sud de l’Italie, découvrant au fil de ses clichés, une humanité qui la touche. Elle passe d’un univers à l’autre, d’une femme habillée à un nu, du monde des intellectuels à celui des ouvriers, d’une école de danse à un chantier, des jeunes riches aux banlieusards, d’un HLM à un centre ville. Ses thèmes finissent par se croiser pour former une fresque sociale de son époque.

La photographie et l’écriture sont pour elle, un moyen de regarder en soi et autour de soi, de satisfaire sa curiosité.

« La curiosité me pousse à affronter des sujets et des ambiances différentes. » Carla Cerati

Au début des années 1970, elle s’intéresse à la chair, à la peau, à l’élégance du nu féminin. Elle recherche la beauté, la perfection formelle, l’abstraction des lignes, pose son regard sur le corps d'une femme qui s’allonge et se mue en une matière souple, c'est pour elle un instrument d’expérimentation qui lui permet d'obtenir l’abstraction des formes. Ses images deviennent des paysages comme celles des photographies de Bill Brandt, un ensemble de détails dudit paysage, le sein est une dune de sable, la hanche une colline. Elle enrichit sa fresque d’une nouvelle empreinte, dans une Italie qui subit le changement, les femmes luttent pour leur émancipation, la société se fait plus laïque, les corps se libèrent et se montrent et pourtant le nu reste un tabou et son travail est une des rares occasions à cette période, de pouvoir le dévoiler et l’admirer.

« La photographie me permet de témoigner du présent, les mots me permettent de récupérer le passé. » Carla Cerati

Autoportrait, 1973

Étude de nu, 1973