James Nachtwey (1948) photographe américain, né à Syracuse dans l'État de New York, il grandit dans le Massachusetts.


James Nachtwey est considéré comme l'un des plus grands photographes de guerre de notre époque, tant par les amateurs que ses pairs, il effectue un tour du monde de l’Enfer dans le but de documenter toutes les situations difficiles dans de nombreux pays. Chacune de ses images se présente telle une icône qui résume parfaitement le conflit du pays qu’il découvre. Il est le successeur direct du photographe Robert Capa, précurseur du photojournalisme et suit depuis le début de sa carrière son mot d’ordre « Si ta photo n’est pas bonne, c’est que tu n’étais pas assez près. »

« J’ai voulu devenir photographe pour être photographe de guerre, mais je suis convaincu qu’une photographie qui révèle le vrai visage de la guerre, est presque par définition, une photographie contre la guerre. » James Nachtwey

Il sillonne le globe depuis près de 20 ans, avec son sac à dos et ses appareils photos impeccablement rangés, se rend sur tous les conflits afin de couvrir ce qu’il se passe, de rendre compte, il parcoure l’Afghanistan, la Bosnie-Herzégovine, le Rwanda, le Salvador, l’Irlande du Nord, le Kurdistan, la Somalie et l’Afrique du Sud pour photographier l’enfer, les ténèbres, le mal dans le monde, l’horreur et la souffrance des hommes. Chacune de ses images se distingue dans la marée des photos de guerre ou la douleur devient presque familière.

« Je veux que le premier impact, et de loin, l’impact le plus puissant, soit une réaction émotionnelle, intellectuelle et morale sur ce qui arrive à ces personnes. Je veux que ma présence soit transparente. » James Nachtwey

Là où d'autres photographes reculent ou se protègent, il est souvent le seul à s'avancer au cœur de l’action, en s'exposant face aux dangers et réussissant des prises de vues cadrées très proches, des photographies authentiques et exigeantes.

« Je veux enregistrer l’histoire à travers le destin d’individus singuliers qui appartiennent souvent aux classes les moins riches, je ne veux pas montrer la guerre en général, ni l’histoire avec un grand H, mais plutôt la tragédie d’un homme unique, ou d’une famille. » James Nachtwey

Malgré sa maîtrise de la couleur qui pour lui semble parfois détourner le regard du sujet principal de la composition, il utilise majoritairement le noir et blanc, un choix émotionnel qui s’impose à lui et qui colle parfaitement à l’atmosphère des sujets choisis. Le noir et blanc permet d’aller directement à l’essentiel, il peut davantage se concentrer sur le cadrage, l’angle de vue et sur l’instant photographié qu’il découvre à chaque périple, réalisant des images soigneusement composées et présentant une parfaite orchestration du chaos.

« Je n’utilise pas les éléments formels de la photographie par pur goût esthétique, je n’utilise pas ce qui se passe dans le monde pour tenir des discours sur la photographie. J’utilise la photographie pour dire ce qui se passe dans le monde, je suis un témoin et je veux que mon témoignage soit éloquent. » James Nachtwey

La photographie chez James Nachtwey est bien plus qu’un métier, c’est une véritable passion, après ses prises de vues, il passe des heures à retoucher la qualité de ses photographies, il ne falsifie aucune de ses images mais cherche à en obtenir un meilleur rendu en modifiant les niveaux de lumière et de saturation dans le but de décrire ce qui c’est réellement déroulé.

« Quoi faire de ma colère. Je devais l’utiliser, canaliser son énergie, la transformer en quelque chose qui clarifierait ma vision, au lieu de l’embrumer. » James Nachtwey

« J’ai été un témoin, et ces images sont mon témoignage. Les événements que j’ai enregistrés ne doivent pas être oubliés et ne doivent pas être répété. » James Nachtwey

Afrique du Sud, 1992

Une image d’un profil poignant qui rend compte de l'existence tribale. Il photographie deux figures humaines inhabituelles dans une nature sereine et paisible, évoquant une toile peinte, dans laquelle s’installe une atmosphère irréelle et mystérieuse.

Parvenus à l’âge viril et selon les antiques rites d’initiation, les jeunes garçons de la tribu de Xhosa sont circoncis, couverts de craie et contraints d’aller dormir à la belle étoile, loin de leur village. Avec des dimensions et des proportions presque semblables à celle d’une statue, le corps couvert de poudre blanche de ce jeune homme emplit le cadre, tandis qu’au second plan, un autre reprend de manière quasi identique la posture et l’attitude du premier.

Survivant Hutu, Rwanda, 1994

D’avril à juillet 1994, en seulement 100 jours, plus de huit cent mille personnes, hommes, femmes et enfants ont été massacrées méthodiquement à coup d’armes à feu, de machettes, et de massues cloutées, pour la plupart d’origine Tutsi, mais également des Hutus considérés comme traîtres, qui se sont montrés solidaires des Tutsis. Fuyant ce génocide, plus d’un million de personnes se retrouvent au Zaïre, constituant l’un des plus grands camps de réfugiés de l’histoire. En 1994, James Nachtwey se rend au Zaïre et rapporte des images bouleversantes, comme celle de ce jeune homme hutu qui a survécu au massacre, après avoir été libéré et recueilli par la Croix-Rouge, ce garçon torturé à coup de machette devient un acte d’accusation envers l’Occident pour avoir fermé les yeux devant le désastre humanitaire du Rwanda.

Une image qu’il cadre très serré sur le visage violenté de l’enfant qui n’est plus que matière, chair meurtrie, cicatrice, image d’un profil poignant qui témoigne et dénonce.

« Cet homme venait d’être libéré d’un camp d’extermination hutu, ou les prisonniers était essentiellement des Tutsi, réduit à la famine, frappés et systématiquement tués. Mais cet homme était un Hutu qui n’avait pas pris part au massacre des Tutsi et qui subissait par conséquent un traitement identique. Je voudrais que celui qui regarde cette image se sente responsable, qu’il ne ferme pas ses yeux, qu’il ne se détourne pas, mais qu’il comprenne que son opinion compte. » James Nachtwey

New York, 11 Septembre 2001

La guerre qui durant des années que les États Unis ont mené loin de leur territoire, atteint subitement le cœur de New York, ville symbolique. Une attaque contre l’Occident, contre ses valeurs, les Twin Towers disparaissent, et derrière une croix rouillée, l’apocalypse éclate.

Le jour de l’effondrement des Twin Tower, le 11 septembre 2001, James Nachtwey est dans son appartement de South Street Seaport, situé à quelques minutes du drame, il se rend sur les lieux et réalise des clichés de la catastrophe qu’il remet douze heures plus tard à la rédaction du « Time Magazine ». 

« Je me suis frayé un chemin parmi la foule en panique et j’ai commencé à prendre des photos de gens blessés allongés sur le trottoir qui se faisaient soigner ou attendaient les premiers secours, j’ai fais la mise au point sur la tour Sud, la croix d’une église au premier plan, quand soudain le gratte-ciel s’est écroulé. Ce n’est qu’a la dernier minute que j’ai compris que j’allais être touché, je me suis précipité pour trouver refuge de l’autre coté de la rue ensevelie par les décombres en un instant, il y avait de la fumée partout, il s’est ensuivi un noir total, comme en pleine nuit, c’était comme si j’étais mort. » James Nachtwey