Ralph Gibson (1939) photographe américain, né à Los Angeles, fils unique de Rita Vargas et C. Carter Gibson qui vivent à deux pas d'Hollywood, son père travaillant à la « Warner Bros. Pictures ». Très jeune le cinéma est omniprésent dans sa vie quotidienne, il obtient dans sa jeunesse quelques rôles de figuration dans des films de Nicholas Ray ou encore d’Alfred Hitchcock pour lequel son père est l'assistant. Suite au divorce de ses parents en 1954, il est en échec scolaire, quitte l’école un an plus tard, et devient mécanicien pendant 6 mois.

  • En 1956, le jour de son anniversaire, il s’engage dans la marine américaine. Il est ensuite affecté à l'école navale de photographie basée à Pensacola, en Floride ou il acquière les techniques de la photographie. Lors de sa première traversée de l'Atlantique, durant un quart vers trois heures du matin, en pleine tempête, observant la nuit, il s'exclame, « Un jour je serai photographe ! ». Cette période de l'armée lui donne l'opportunité de découvrir le monde, pendant les escales à New York, il fréquente les clubs de jazz et assiste à des lectures de poésie d'Allen Ginsberg, Gregory Corso et Jack Kerouac. C'est au sein de l'armée qu'il réalise ses premiers clichés, des portraits, des photos aériennes et des photos documentaires pour l’armée. Il continue sans cesse d’apprendre d’autres techniques comme la réalisation de publications imprimées, négatifs en demi-teinte et plaques sensibles de similigravure. C’est à partir de ce moment qu’il trouve définitivement sa voie, celle de la photographie.

  • En octobre 1959, à la fin de son service militaire, influencé par l'ouvrage, « Sur la route » de Jack Kerouac, il part en auto-stop en direction de Los Angeles, rejoignant la ville en seulement quatre jours, sur place dans un premier temps il veut s'inscrire à « l'Art Center » afin d'apprendre la photo commerciale ou la photo de mode, mais entre temps, rendant visite à San Francisco à un ami, il fait la connaissances d'étudiants du « San Francisco Art Institute » et décide de s'y inscre immédiatement, afin pour de poursuivre ses études photographiques.

  • En 1960, il s'installe à San Francisco dans un hôtel bas de gamme, au centre du quartier de North Beach et suit seulement deux semestres de cours, se sentant confirmé dans sa vocation, il croit que la meilleure façon de devenir photographe n'est pas de rester à l'école mais d’être sur le terrain. L'un de ses professeur, Paul Hassel, le recommande à Dorothea Lange qui cherche un assistant afin de pouvoir développer ses négatifs, la collaboration avec la photographe dure un an et demi, période pendant laquelle, il mène parallèlement son travail personnel, équipé d'un Rolleiflex qu’il a acheté lors de son service militaire.

  • Il effectue sa première exposition à la Galerie « Photographers' Roundtable » de San Francisco.

  • En 1961, il opère un changement technique radicale, en passant au Leica petit-format 24x36, un appareil le décrivant « Il a la manière d'exprimer ce que je désirais ».

  • En 1962, il décide de retourner à Los Angeles pour se concentrer sur son aspiration initiale, le photojournalisme, entame une carrière de photographe indépendant, obtenant peu de contrats et commandes, malgré tout il est engagé pendant plusieurs mois par la « Cinerama Corporation », qui prépare l'exposition universelle de New York de 1964. Ses premières photos sont publiées en 1963 dans la revue « Nexus » de San Francisco.

  • De 1965 à 1966, il travaille pour plusieurs graphistes en vogue, l'agence « Kennedy Graphics » lui passe une commande concernant le quartier du « Sunset Strip » à Los Angeles. Ses clichés aboutissent à la publication de son premier ouvrage « The Strip ». Los Angeles lui fait « l'effet d'une ville un peu primitive » qui ne lui convient pas, dès l’automne 1966, il déménage pour New York avec ses trois Leica dans sa valise et s'installe au Chelsea Hôtel avec seulement 200 dollars en poche.

  • Dès son arrivée, la ville de New York stimule son imagination, il la considère comme un paradis pour photographes, de suite il obtient de nombreux contrats et fréquente les milieux des jeunes artistes.

  • Au début de l'année 1967, il y rencontre Robert Frank. En 1968, il fait la connaissance de Larry Clark et Mary Ellen Mark, il change alors profondément sa pratique photographique, et s'éloigne du reportage, en rejetant la photographie commerciale.

  • Attiré par des écrivains du nouveau roman comme Marguerite Duras et Jorge Luis Borges, la musique atonale ainsi que la poésie concrète, il se met à vivre la nuit et à dormir le jour. Il considère que la photographie est l'instrument de son introspection, ses clichés prennent une tournure surréaliste et il décide de les réunir dans un ouvrage, « The Somnambulist », il lui faut plus de trois ans avant de réussir à le publier, en 1969, il rencontre plusieurs éditeurs avec une maquette terminée, mais refuse finalement les offres qu'on lui sont proposés, voulant conserver son autonomie éditoriale. Il crée alors sa propre maison d'édition, « Lustrum Press », avec laquelle il publie en 1970 « The Somnambulist » à 3000 exemplaires, dès la sortie de son livre, l'accueil est enthousiaste et le succès immédiat.

  • A partir de ce moment il est connu et reconnu dans les cercles photographiques. Il utilise l'argent gagné avec « The Somnambulist » pour voyager à l'étranger, se rend en Europe en 1971 et réalise de nombreuses photos sur le territoire français, puis parcoure l'Angleterre, des images qu'il inclue dans « Déjà Vu », son second volume de sa « Trilogie noire » après « The Somnambulist », le troisième et dernier tome de sa trilogie est publié en 1974 intitulé « Days at Sea ».

  • Il obtient les bourses de la « NEA » et du « Guggenheim ». En 1977, il rencontre Mary Jane Marcasiano qui devient sa compagne, sa muse et le sujet de ses nouvelles ses photographies

  • Il est représenté à maintes reprises aux « Rencontres d’Arles » à travers des soirées et expositions en 1975, 1976, 1977, 1979, 1989 et 1994. Il reçoit la mention du prix du « Livre des Rencontres d'Arles » en 1983 pour « Syntax ». En 1986, Il est nommé « Officier de l’Ordre des Arts et des Lettres » par le gouvernement français. En 2007, est récompensé du « Lucie Award » à New York.


Habitué depuis son enfance à la fréquentation des tournages de films, ses photographies recréent souvent un climat narratif proche de celui du cinéma. Ses images introspectives, en noir et blanc très contrasté, caractérisent son travail. Désireux toujours de garder son indépendance graphique, comme un support privilégié, il n'a de cesse de l'exprimer dans ses images. En permanence, le corps morcelé de la femme nue et les mains reviennent comme un leitmotiv. Il aime à créer du mystère par des gros plans dans des lumières crues. Comme une tranche de décor trop éclairé, où les acteurs tels des mannequins rodent harmonieusement en cherchant leur place et leur rôle. Dans des espaces inhabités et lisses où le temps est suspendu, les corps aux poses parfois lascives, souvent affectées, avec ou sans accessoire symbolique, font références aux photographies surréalistes, avec parfois un certain érotisme, qui souvent les accompagne. Tout comme dans ses portraits, paysages et photographies de bâtiments, il installe de la froideur et une géométrie dans l'espace, de la pureté sophistiquée dans ses cadrages, afin d'obtenir du graphisme.

Ses séries de clichés s’inscrivent dans un processus créatif, il adopte une approche plus introspective et surréaliste dans son œuvre. Il sort dans la rue pour chercher une image dans la réalité du quotidien. Comme les murs qu’il photographie, des murs blancs, noirs, de briques ou de béton. Il commence à les photographier en noir et blanc puis en couleur, du rouge au bleu, passant par le vert et le jaune et d'un seul coup un mur de briques au coin d’une rue devient avec Gibson, étrange, magique et merveilleux. Il n'essaye pas de réaliser des photos abstraites, ce sont uniquement ses prises de vue qui font ressortir l’abstrait qui existe en toute chose, qui se trouve autours de nous.

Site Officiel : Ralph Gibson

« Je ne cesse de me rapprocher des sujets que je photographie : chaque année je gagne quelques centimètres. » Ralph Gibson

Brick Wall, New York, 1975

Paris, 1986