Ray K. Metzker (1931-2014) photographe américain, né à Milwaukee dans l'État du Wisconsin, issu d'une famille protestante et conservatrice, composée de trois enfants, dont il en est le cadet, d'un père comptable, qui rêve pour son fils d’une réussite dans les affaires, et d'une mère accaparée par sa fille aînée handicapée.
En 1943, très jeune à l'age de 12 ans, lorsque sa mère lui offre son premier appareil photo, un Kodak Brownie, il se passionne immédiatement pour la photographie. Adolescent, il effectue des petits reportages pour son école et pour le quotidien local, le « Milwaukee Journal », en s’inspirant des parutions à l’époque, du magazine Life.
En 1953, n'ayant aucune culture photographique, il s'inscrit dans la filière art visuel des Beaux-Arts, à Beloit College dans le Wisconsin, c'est la qu’il découvre le travail d’Henri Cartier-Bresson, d’Edward Weston et adopte de suite l’appareil photo Leica, avec succès il en sort diplômé.
En 1954, il est appelé sous les drapeaux et part en Corée ou sur place, il anime des ateliers de photo pour l’armée et vingt-et-un mois, fait une demande afin d'être réformé pour pouvoir poursuivre ses études. Il tente et réussi le concours d’entrée à l’ « Institute of Design » de Chicago, qui à l’époque, est appelé le « New Bauhaus », en étant considéré comme l’une des plus importantes écoles photographiques, il y suit des cours, en étant l'élève des photographes, Harry Callahan et Aaron Siskind, obtenant son Master en 1959. Afin de réaliser son travail de fin d’étude, il s'équipe d’un Leica et d’un Rolleiflex, arpente le Chicago Loop, quartier du centre cerné par des lignes de métro et effectue une série intitulée « My Camera and I in The Loop », composée de cent dix-neuf tirages, attirant immédiatement l’attention du directeur du département photographique du Museum of Modern Art de New York, Edward Steichen, qui lui en achète dix exemplaires.
« Le Loop offrait de multiples possibilités, ça me donnait aussi un sentiment de liberté, de mobilité dans mes explorations. Je pouvais être une mouche sur le mur, observant la rue et restant aussi anonyme que possible. » Ray K.Metzker
En 1959, à peine sorti de l’école, l’Art Institute of Chicago lui consacre sa première exposition personnelle, bien loin du photojournalisme ou de « l’instant décisif » de Cartier-Bresson, ilest immédiatement saluée par ses pairs, tout en restant modeste, jusqu'à rechigner à se rendre à ses propres vernissages.
En 1960, après des études supérieures, il parcoure l'Europe, pendant une année, il y découvre la lumière de la Méditerranée. Il épouse la photographe Ruth Thorne-Thomsen.
En 1962, il s'installe à Philadelphie. Par la suite, il enseigne durant de nombreuses années au sein de « College of Art » à Philadelphie et à l'Université du Nouveau-Mexique.
En 1967, le Museum of Modern Art de New York lui rend hommage en organisant une grande exposition de ses œuvres.
En 1985, en Toscane, il s’intéresse au paysage, et le traduit au sein d'une série qu'il nomme « Feste di Foglie. »
En plus de 60 ans de carrière, il fait l’objet de plus de cinquante expositions personnelles dans les plus grands musées du monde, et reçoit de nombreux prix, dont une bourse de la John Simon Guggenheim Memorial Foundation, deux bourses du National Endowment for the Arts, et de la Royal Photographic Society. Ses œuvres figurent dans les collections de plus de quarante institutions et font l’objet de plus de dix monographies, dont le Museum of Modern Art, le Metropolitan Museum of Art, le Whitney Museum of American Art, la National Gallery of Art, le National Museum of American Art, le Smithsonian, le Los Angeles County Museum, le J. Paul Getty Museum, l’Art Institute of Chicago le Philadelphia Museum of Art, le Musée de l’Elysée de Lausanne et l’Albertina à Vienne.
Considéré comme un maître de la photographie américaine, ses créations d'une force visuelle, son œuvre fait la part belle à la photographie, dans son noir et blanc, ses ombres et lumières et ses compositions, tout en lorgnant vers l’expérimentation, il s'adonne à la multiple exposition, la superposition de négatifs ainsi qu'à la juxtaposition d’images.
« La photo est si ancrée en moi, je ne peux guère imaginer faire autre chose. Elle est mon alter ego, l’autre de mon dialogue intime. » Ray K.Metzker
Depuis le début la lumière se révèle pour lui la chose la plus importante dans son travail, il cherche dans chacune de ses images, d'effectuer synthèse et la complexité plutôt que la simplicité. Il est connu principalement pour ses photographies de paysages urbains en noir et blanc, des images audacieuses et expérimentales ainsi que pour ses grands composites, des assemblages de bandes de films imprimées et d'images individuelles.
Il cherche dans les rues de Chicago, de Philadelphie, ou celles de Washington, le subtil équilibre entre les versants sombre et clair des choses, l’espace urbain est son terrain de jeu afin de le traduire de multiples manières, en réalisant des images conçues au fil à plomb et à la règle, de manière géométrique.
Les rues dans sa chambre noire, se transforment en aplats abstraits avec un noir et le blanc qui restent sa palette. Il ne cède jamais à la couleur ni au grand format qui sont pourtant à la mode et travaille uniquement à l'argentique. Ses images sont une réalité fragmentée, s’apparentant à des partitions musicales de noirs et de blancs, où le négatif devient le positif.
« La rue est une scène privilégiée d’interactions humaines. D’abord, j’observe minutieusement tout ce qui s’y passe, l’appareil tourné vers le sol. Puis je le relève et m’intéresse au mouvement, au flot d’hommes et de femmes qui apparaissent et disparaissent, à cette pulsation. » Ray K.Metzker
Pour lui, un enchevêtrement de branches devient un motif où le noir est moins envahissant, les personnages sont eux solitaires, écrasés par l’architecture des grandes villes américaines, émergeant à la lumière avant d’être avalés par l’ombre.
« Ce n’est pas le médium qui a des limites, mais l’imagination de l’artiste. » Ray K.Metzker
Sous l’influence de la photographie brute de William Klein, il se préserve d’un style trop graphique et esthétisant, toute sa vie, il n’a de cesse d’expérimenter, de surexposer, de recadrer ou de revenir sur ses négatifs des années plus tard, il assemble ses images non contiguës en ajoutant une bordure noire entre les deux, les « Double Frame » ou considère la pellicule comme un seul négatif pour ses « Composites », il joue en permanence avec la multiplicité, les variations d’échelle, les cadrages, allant même à intercaler un objet devant l’objectif. Ses photographies, traversent le temps, elles sont toujours actuelles tant leur rendu s’apparente à la finesse du design contemporain.
« L'artiste commence ses explorations en embrassant ce qu'il ne connaît pas. » Ray K.Metzker
Washington, D.C, 1964