Laure Albin-Guillot (1879-1962) photographe française, née Laure Meifredy à Paris, à l'age de vingt deux ans, en 1901, elle épouse le Docteur Albin Guillot, chercheur scientifique.

    • Au début des années 1920, elle débute la photographie, d'abord influencée par le « pictorialisme », elle reçoit en 1922 la médaille d’or au concours de la Revue française de photographie.

    • Dès le milieu des années 1920, avec l'avènement de la « Nouvelle Vision », elle se tourne vers la modernité en s'orientant dans la nouvelle photographie, effectue des recherches dans le domaine de l'art décoratif et réalise de nombreux clichés de préparations microscopiques de cristallisations et de cellules végétales, qu’elle nomme « micrographies ».

    • En parallèle, elle photographie les membres de sa famille ainsi que son cercle d’amis, elle devient rapidement une portraitiste professionnelle reconnue, en défendant le portrait dit psychologique.

    • En 1928, elle participe aux côtés d’André Kertész, au premier Salon des indépendants de la photographie, dit « Salon de l’escalier ».

    • En 1929 suite au décès de son mari, elle vit de ses commandes de portraits, de photographie de mode et publicitaire à travers lesquelles, elle est une pionnière, durant l’entre-deux-guerres, elle mène de front une activité commerciale rentable et une activité créatrice intense.

    • En 1931, elle publie son ouvrage, « Micrographies décoratives » regroupant ses compositions abstraites.

    • En 1932, œuvrant pour la reconnaissance de son art, elle fonde la « Société des artistes photographes ». La même année, elle est nommée archiviste en chef au service des « Archives photographiques des Beaux-arts », et l'année suivante, devient le premier conservateur de la « Cinémathèque nationale » du palais de Chaillot.

    • En 1933, elle publie un ouvrage intitulé « Photographie publicitaire », définissant le rôle de la photographie dans la publicité moderne. Elle est l’une des rares photographes à aborder le nu masculin hors du cadre sportif ou allégorique, en 1935, lors de son exposition « Portraits d’hommes » à galerie Billiet-Vorms de Paris, la photographe présente ses portraits classiques aux cotés de ses nus audacieux.

    • En 1936, elle est membre du jury de l’Exposition internationale de la photographie contemporaine au pavillon de Marsan au palais du Louvre, et obtient avec Emmanuel Sougez, la création d’une section photographique pour l'Exposition internationale des arts et techniques de 1937.

    • En 1939, elle réalise un reportage sur les monuments de Paris et leur protection pendant l'Occupation.

    • En 1946, elle réalise avec l'écrivain Henry de Montherlant, un ouvrage « La Déesse Cypris », composé de douze de ses études de nue féminins.

    • En 1964, l’Agence Roger-Viollet fait l’acquisition du fonds d’atelier Laure Albin Guillot, le fonds composée de 52 000 négatifs et 20 000 épreuves, appartient aujourd’hui à la Ville de Paris, après un long travail d’inventaire, ses clichés sont alors rendu accessible.


Au départ, elle adopte le style pictorialiste, photographie des paysages, en obtenant un flou léger et vaporeux avec des objectifs Eidoscope et Opale puis dès le milieu des années 1920, elle prend un tournant radical, passant avec intelligence, à une esthétique moderniste, en réalisant des nus féminins aux poses et aux cadrages classiques, elle évolue sans cesse en travaillant les blancs et de nouveaux cadrages, tout en soignant ses tirages, effectuant de nombreuses recherches sur les papiers photographiques.

Modèle de réussite d’une femme photographe, Laure Albin Guillot joue un rôle de passeur entre deux générations artistiques, celle des « pictorialistes », mouvement artistique qui veut rapprocher la photographie de la peinture, à celle de la « Nouvelle Vision », tournée vers la modernité. Elle marie l’élégance, la fantaisie et le classicisme, et n'a de cesse d’explorer les nouvelles possibilités offertes par la photographie en réalisant des images abstraites saisissantes, utilisant la photomicrographie, qu’elle renomme « micrographie », offrant de nouvelles perspectives créatrices en combinant science et arts plastiques.

En 1931, avec son ouvrage « Microgaphie décorative » dans lequel elle rend hommage au potentiel décoratif ornemental avec la photographie de l'infiniment petit, lui vaut un immense succès.

Photographe indépendante, vivant dans le 16eme arrondissement de Paris ou elle installe son atelier, toute sa vie, elle se consacre à des genres variés, le portrait, le nu, le paysage, la nature morte, technicienne hors pair et photographe de son temps, elle utilise tout les modes de diffusion, de la presse et à celle de l’édition en passant par des illustrations et des créations publicitaires. Portraitiste reconnue, elle photographie André Gide, Paul Valéry, Jean Cocteau, elle participe à la revue « Arts et métiers graphiques » dirigée par Charles Peignot, ainsi que celle de « vu ».

Sa photographie incarne ce que l'on appelle, le style français, avant-gardiste, elle se révèle d’une tradition à contre–courant, au cours des années 1930 et 1940, elle est l'une des artistes qui occupe et domine la scène photographique française de l'entre -deux-guerres, avec des clichés ou elle maitrise technique, depuis l'éclairage jusqu'au tirage, son style subtil est empreint d'un imaginaire classique ou l'élégance et épuration formelle ont une place de choix. La photographie est pour elle, avant tout, un art décoratif, elle fréquente autant les céramistes, les dinandiers, les verriers, les décorateurs que les artistes peintres, sculpteurs et écrivains.

Auteur d'ouvrages édités à tirage limité, elle illustre « Narcisse » de Paul Valéry, « Les Chansons de Bilitis » de Pierre Louÿs et en 1948, les Préludes de Claude Debussy.

Louis Jouvet, 1925

Micrographie Décorative, 1927

Micrographie Décorative, Coupe d'un Bourgeon de Frêne, 1930

Ce cliché photographique extrait du recueil « Microgaphie décorative », celui d'un bourgeon de frêne, en bleu et blanc formant des arabesques, évoque alternativement un motif végétal et aquatique. Pas de ciel ni de terre, aucun ancrage ou repère identifiable dans cette image dont l’ambiguïté oscille entre celle du sujet photographié et la nature de l'image reproduite. C'est l'ivresse de l'infiniment petit, le pouvoir de transformation du microscopique, une passion qu'elle partage avec son mari qui collectionne les échantillons microscopiques.

Le bleu monochrome qu'elle obtient est celui de son procédé de tirage, un bleu de Prusse à base de sel de fer, la technique de cyanotype, inventé en 1842 par le scientifique et l'astronome Sir John Frederick William Herschel, des bleus faciles à réaliser et peu onéreux, surtout utilisés pour tirer des plans, procédé qui est l’ancêtre de la photocopie et qui a l'avantage d’être durable, pour la photographe ce ne sont pas ces deux principes qu'elle recherche mais l'esthétique décorative.

Lucienne Boyer, 1935