Notes pour une exposition

À présent je m’allonge pour rêver du Printemps*

Notes pour une exposition

Catherine Grangier- août 2017

"A l’origine de l’exposition, il y a l’envie de l’équipe d’Alter-Art d’exposer ma série de gravures « L’ombre de mes rêves ». Ce sont des linogravures de femmes endormies, des linogravures où le fond se mêle à la forme, où la figure se perd entre les motifs, des filles qui rêvent…

La fille qui rêve…

Se prend les pieds dans la réalité.

Elle dégringole entre les casseroles.

Elle trébuche silencieusement sur le carrelage glissant.

La fille qui rêve…

Balbutie des histoires à son reflet dans le miroir.

Elle s’échoue dans l’évier à la recherche de mots doux délavés.

Elle sautille, légère, entre les moutons de poussière.

La fille qui rêve…

S’illumine dans l’éclat mordoré des épluchures de légumes.

Elle se trouble dans les eaux brunes d’un café de fortune.

Elle s’abandonne à la caresse d’un souvenir qui blesse.

La fille qui rêve…

Joue à disparaître derrière les tentures et les fenêtres.

Elle effleure les masques et se masque de fleurs.

Elle se berce sans cesse, accrochée à un fragment de papier.

Pour compléter l’exposition –et parce que j’aime créer des œuvres en fonction du lieu où j’expose- j’ai réalisé « Les mains rouges » (le titre est un petit clin d’œil au roman de Jens Christian Grøndahl) : des linogravures imprimées sur de grands pans de tarlatane suspendus au plafond qui jalonneront l’espace. Une installation conçue pour l’espace allongé de la galerie. Des mains en hommage à Raphaël, Rodin et Louise Bourgeois… Des mains qui se tendent, se tentent, se touchent, s’éloignent ; des caresses volatiles, des rêves tactiles, des mains sur des voiles de tarlatane entre lesquelles se glisser, se cacher, inventer des effleurements… Des mains comme des gants, en référence à l’histoire du quartier (ganteries)

« sur un lit de roses… » est la seconde pièce créée pour l’exposition. Un lit pour les « filles qui rêvent », un lit d’enfant rempli de fleurs de tampax, un lit de contres de fées, entre douceur des pétales et piquant des épines invisibles, entre rêve et cauchemar, entre enfance et féminité, entre Blanche-Neige et Cléopâtre… des fleurs de tampax pour évoquer le printemps, les fleurs, mais aussi, la puberté, la ménopause, le temps dans la vie des femmes, rythmé par les règles… un lit en lien également avec des lits présents dans les travaux d’artistes que j’admire, Tracey Emin, Jana Sterback, Louise Bourgeois, Sophie Calle, ou Ghada Amer…

Enfin « le petit bal du temps perdu » dont le titre oscille entre Proust et Bourvil est une installation composée de mécanismes d’horloges et d’impressions sur papier. Parce que le temps du rêve est rythmé par le temps qui passe, une installation comme une danse où les pieds n’arrêtent jamais de tourner. Une danse de contes de fées, de Cendrillon aux Souliers rouges, pour faire valser le temps, une course contre la montre pour atteindre l’objet du désir, une promenade poétique rythmée par le tic-tac des aiguilles.

L’ombre de mes rêves © Catherine Grangier

Sur un lit de roses... © Catherine Grangier

L’ombre de mes rêves © Catherine Grangier