Entre terre et ciel

Entre Terre et Ciel

Film de Rebuffat Grand prix du festival de Trento 1961

article publié dans "Der Berglvamerad" en 1962

Lorsqu'on voit un film une seule fois, et dans l'ambiance d'un festival, il est difficile d'en faire une analyse, on peut tout au plus évoquer les sensations éprouvées. Voici les miennes à propos de ce film :

beauté des images, exceptionnelle et bouleversante beauté de certaines, faiblesses du film, exceptionnelle faiblesses de certains passages.

Quelques uns de mes reproches ? Une histoire bien "mince", des gags déjà vieux, des effets réussis mais dont la répétition diminue la valeur, des marches d'approche fantaisistes dont on écarte pudiquement tout moyen artificiel, un anorak moderne dans la théâtrale reconstitution de la mort de Carrel, un commentaire où les lieux communs ne manquent pas. Quant à la présence de Maurice Baquet et Tazieff, je pense qu'elle n'ajoute quelque chose que sur le générique. Et puis, ce bivouac volontaire, cet igloo au sommet du Mont blanc, ne font-ils pas un peu "pâtés de sable" ?

Je crains que le "grand public" ne prenne les alpinistes pour des enfants attardés, comme je crains que le spectacle de ces grimpeurs bien rasés, au soulier ciré de frais et un éternel sourire aux lèvres, ne lui révèle guère ce qu'est, en réalité, une grande course.

Trop de concessions donc, trop de concessions faciles à ce "grand public", qui, heureusement pour mon ami Rebuffat ne lira pas cette critique. Mais ici au G.G.M., nous sommes entre alpinistes, c'est en alpiniste que nous jugeons ... et aucun d'entre nous ne conserverait son sac sur les épaules pour se reposer au sommet du pilier Bonatti. Mais qu'importe ces fautes, ces fautes commerciales, puisque c'est à leur prix que nous retrouvons le plus merveilleux visage des lieux qui nous sont chers.

Georges Livanos