les maitres sculpteurs

Jean Baptiste Barré (statuaire) 1804-1877

François Lanno (sculpteur) 1800-1871

François Rude (statuaire) 1784-1855

Jean Marie Valentin: 1823 - 1896

Mémoire écrit par Paul Valentin vers 1920.

Quelques extraits de la thèse de doctorat par l’Abbé Pocquet du Haut Jussé (1984).  « Le Mobilier Religieux au 19ème siècle en Ille-et-Vilaine ».




Jean Baptiste Barré (statuaire) 1804-1877

 

Jean Baptiste Barré est né à Nantes le 28 septembre 1804.

Son père sculpteur ornemaniste à Nantes, remarqua, de bonne heure, que son fils avait des aptitudes pour un art plus élevé que celui qu'il pratiquait. Il le plaça à 14 ans dans l'atelier de Debay. Celui ci quitta Nantes pour Paris et Jean Baptiste Barré devint alors élève de Mochnet pendant près de trois ans. Il se rendit ensuite, lui même, à Paris où il travailla à la restauration du château de Rosny, habité par la Duchesse de Berry, toute pleine d'attentions maternelles envers le jeune homme.

En 1827, Jean Baptiste Barré est appelé pour des travaux à exécuter à la cathédrale de Rennes. Il se plu à tel point à Rennes, qu'il s'y fixa définitivement en 1830. Il ouvrit un cours de dessin et de sculpture et s'installa rue Nantaise. En 1831, il collabora à l'école des Beaux Arts. Ensuite il s'installa définitivement dans une maison renaissance au 5 quai Châteaubriant.

 

En 1836, il exécuta la statue surmontant la colonne de juillet érigée au jardin du Thabor, à la mémoire de Vanneau et Papu.

Ses œuvres religieuses sont nombreuses, il exécuta pour "son" église, l'église Saint Étienne, la monumentale statue de Madeleine du désert, qui lui valu une médaille d'or, à l'exposition de 1843 à Paris. 

A Rennes, nombreuses sont les œuvres de Jean Baptiste Barré, on peut citer entre autres: des statues de Saint Jean, De Saint Yves de l'Hôtel Dieu, l'espérance de la chapelle mortuaire du cimetière du Nord, de Saint Pierre et Saint Paul pour l'église Saint 

Sauveur, de Saint Aubin et Sainte Anne pour l'église Saint Aubin. Les bustes d'Edouard Tuquety, d'Yvariste Boulay-Paty, d'Edgar Leperdit et de Bertrand Du Guesclin au Thabor, celle ci fut abattu le 31 mai 1950, par les autonomistes bretons qui accusaient Du Guesclin de "collaboration" avec les français. On lui doit aussi des ornementations de frontons: du Palais Universitaire, du Lycée de l'Hôtel Dieu et de la Préfecture de la rue Martenot, ainsi que de nombreuses décorations dans des hôtels particuliers.

Jean Baptiste Barré fut membre de l'Institut des Provinces de France, sculpteur en titre de la ville de Rennes et reçu la Légion d'Honneur des mains de Napoléon III de passage à Rennes.

 

Sur la fin de sa vie il fut ruiné. Lui qui avait dit à sa femme du 5 quai Châteaubriant, "c'est là que nous nous reposerons sur nos vieux jours. C’est là que nous mourons" du vendre sa maison qu'il sculpta naguère, s'ajouta à cela le décès de son épouse.

 

Jean Baptiste Barré travailla du matin au soir, pour gagner une ration journalière de pain. Oublié de tous, il mourut le 25 avril 1877 à Rennes au 3 Boulevard Magenta.

                                                                                                                                 Joël David

 

Sources:

Archives Départementales.

Dictionnaire Religieux Bretons: Lagrée.

Ouest-France 1948.

Dictionnaire des Peintres, Sculpteurs et Dessinateurs: Bénézit.

 

François Lanno (sculpteur) 1800-1871

 

François Gaspard Aimé Lanno est né à Rennes le 28 Pluviôse de l'an Vlll, soit le 17 février 1800.

François Lanno fut élève de l’École Publique de Peinture, Sculpture et Dessin de Rennes, où il obtint un premier prix de sculpture en 1817.

 

Grâce à ses dons exceptionnels, il fut encouragé par ses maitres à poursuivre ses études à Paris. C'est au prix d'énormes sacrifices, que sa mère le laissa continuer au moins trois ans dans la capitale.

Le Conseil Municipal de Rennes, sur proposition de Mr de Lorgeril, lui accorda une subvention en 1822 et 1823, dont il saura se montrer toujours reconnaissant.

 

Élève de Cartellier et de Lemot, il se voit attribuer le deuxième Grand Prix de Rome en 1825, puis le premier prix en 1827 et devint donc pensionnaire de l'Académie de France à Rome.

 

La ville de Rennes le charge alors de l'exécution de statues pour la décoration de la nouvelle salle de spectacle. Ces dix statues, de 2,25 m de hauteur, devront être livrées avant le 1er décembre 1835 et représenteront Apollon et ses Muses. Ce sont elles qui ornent actuellement la façade de l'Opéra de Rennes et elles sont disposées dans l'ordre suivant: Uranie, Erato, Melpomène, Euterpe, Apollon, Clip, Thalie, Terpsichore, Polymnie et Calliope. 

En   1832, reconnaissant envers sa ville natale qui l'avait noblement encouragé financièrement durant ses études, François Lanno fit don de sa "figure de Sanson" qui se trouve toujours au Musée de Rennes, ainsi que d'autres œuvres qui y rentrèrent par la suite: "Lesbie, Noé, Figure Académique, deux têtes de femmes représentant les Sciences et les Arts, De Barante, Brune...."

 

C'est aussi à lui que l'on devait la statue de Bertrand d'Argentré, une des quatre statues qui ornaient la façade du Parlement de Bretagne et qui fut détruite par la suite.

 

François Lanno est aussi l'auteur de statues décoratives du Louvre, ainsi qu'à Périgueux, à Brive et notamment Sainte Geneviève à l'église de la Madeleine et Flechier de la Fontaine de la Place Saint Suplice.

François Lanno mourut en 1871 à Beaumont sur Oise et fut inhumé au cimetière du Nord à Rennes.

                                                                                                                                                  Joël David

Sources:

Délibération du Conseil Municipal de 22 décembre 1906.

Dictionnaire Encyclopédique Larousse.

Dictionnaire des Peintres, Dessinateurs et Graveurs: E Bénézit-BM.

Dictionnaire: Nouvelle Biographie Général- BM



François Rude (statuaire) 1784-1855

 

François Rude est né à Dijon en 1784.

 

Il reçu à Dijon et Paris (1809) une formation néoclassique.

En 1812, il obtint le prix de Rome, alors qu'il faisait partie d'une triade de sculpteurs: David d'Angers et Pradier.

 

A la chute de l'Empire, il s'établit à Bruxelles une douzaine d'années.

Armé du compas et du fil à plomb en face du modèle vivant, il levait pour ainsi dire le plan topographique du corps humain. Ses élèves les plus ailés tatouaient d'encre les articulations et les saillies du modèle.

 

Rentré en France en 1827, il se fit connaitre par le pêcheur napolitain jouant avec une tortue (1831-1833) Louvre.

On lui doit aussi des statues pleines de vie et de vérité: le maréchal Ney ou le réveil de Napoléon.

 

Le départ des volontaires en 1792 que l'on connait aussi sous le nom de Marseillaise, un des haut reliefs de l'Arc de Triomphe fut inauguré en 1836.

Œuvre montrant la fureur guerrière de la Victoire, une sorte de synthèse grandiose du néoclassicisme et du romantique.

 

Un voyage en Italie, au début de 1842 lui fit découvrir la sculpture antique dont il devint un admirateur.

 

François Rude a enseigné une dizaine d'années à Paris, de1842 à 1852.

Dans ses deux ateliers de la rue de l'Enfer (rue Barbusse) le maître a su créer une atmosphère chaleureuse. Son désintéressement et sa droiture en firent un soutient très efficace pour ses élèves.

Il disait:" On ne s'élève pas plus haut que la nature, l'essentiel c'est que vous soyez vrais du fond à la surface  et que cela saute aux yeux".

"Tout chef d'œuvre existe dans le monde réel et non ailleurs, il s'agit de l'extraire intégralement..."

 

C'est par un retour au néo classicisme qu'il terminera son œuvre: son Hébé et l'Aigle de Jupiter, ce marbre fut terminé après sa mort par son neveu Paul Cabet (Musée de Dijon)

 

François Rude est mort le 3 novembre 1855 à Paris.

                                                                                                                                       Musée d'Orsay

Sources:

L'Aventure de l'Art au XIXème siècle.

Dictionnaire de la Sculpture (Larousse).

Musée d'Orsay


https://www.wikiwand.com/fr/Jean-Baptiste_Barr%C3%A9 

https://www.wikiwand.com/fr/Fran%C3%A7ois_Lanno

https://www.wikiwand.com/fr/Fran%C3%A7ois_Rude 



Jean Marie Valentin: 1823 - 1896

Mémoire écrit par Paul Valentin vers 1920

 

Il pourra peut-être paraître étrange de nous voir commencer cet ouvrage par deux articles qui parurent après la mort de J.M. Valentin, mais ces deux articles sont pour ainsi dire le résumé de toute sa vie et ils serviront en quelque sorte de préface. Nous les publions in extenso.

Nous lisons le premier dans le journal de Rennes du 13 août 1896. Il est signé de l’Abbé Robert qui connut particulièrement cet artiste incomparable dont nous allons essayer de retracer la vie et résumer les œuvres.

 

« Le samedi 8 août mourait dans la rue Stanislas à Paris, un homme dont le talent fait honneur à la Bretagne et dont la statue devra trouver place dans le Panthéon Breton, si ce grandiose projet aboutit jamais.

Mr Valentin naquit à Bourg des Comptes en 1823. Il fut un sculpteur chrétien qui, comme ses ancêtres du moyen âge, sut imprimer sur les œuvres dont il a rempli, je ne saurai dire combien d’églises, le sceau de l’art et de la foi. C’est dans l’église Notre Dame de Rennes, la statue de M. Meslé, dans la cathédrale de Saint Malo, le tombeau de M. Huchet, dans l’église de Notre Dame de Vitré, la statue de M. aubrée, dans l’église de la Guerche, celle de M. fouré. Ailleurs, ce sont des autels ou des chaires, comme dans la cathédrale de Dol de Bretagne, dans les églises de Saint Servan,  Dinard, Bain de Bretagne , etc…

Qui ne connaît l’incomparable tombeau de Saint Yves, ce chef d’œuvre de la cathédrale de Tréguier (22), qui suffirait à lui seul, à placer M. Valentin au premier rang des artistes du XlXème siècle.

C’est encore à son ciseau si délicat que l’église métropolitaine de Rennes et l’église de Bourg des Comptes doivent les statues si fidèles, si vivantes, du regretté cardinal Saint Marc, son concitoyen.

M. Valentin est mort à la tâche, en ciselant la statue de Mgr Gonindard, archevêque de Rennes. Pieux, modeste, aimable, il a imité jusque dans sa mort, le regretté Prélat. Grâce à Dieu, le modèle est terminé, il est au moulage, et, dans quelques temps, nous pourrons admirer, dans notre cathédrale, le dernier chef d’œuvre de M. Valentin, achevé par ses fils, auxquels il a laissé, avec son ardente foi, le secret de son art.

Que sa famille désolée veuille bien croire à notre sincère douleur, que partagerons tous les artistes, tous les Bretons, tous les amis de l’art chrétien ».

                                                                                                            C.R.

 

Le deuxième article parut dans la semaine religieuse du diocèse de Rennes le 29 août 1896 :

« M. J.M. Valentin, le sculpteur breton si apprécié dans notre pays, est mort à Paris, le samedi 8 août dernier. Cet artiste, au talent incontesté, durant de nombreuses années, a enrichi notre diocèse d’œuvres multiples auxquelles il savait imprimer un cachet religieux tout particulier. C’est à son ciseau si délicat que notre cathédrale doit la statue du regretté cardinal Mgr Brossay Saint Marc et son Chemin de Croix. L’église Notre Dame de Rennes, la cathédrale de Saint Malo, Notre Dame de Vitré, La Guerche, Dol, Saint Servan, Dinard et un grand nombre d’autres églises d’Ille et Vilaine possèdent des statues, des tombeaux, des autels ou chaires qui font le plus grand honneur au vaillant sculpteur. Il fut secondé dans beaucoup de ses œuvres, pour la partie décorative, par son frère Antoine.

M. Valentin est mort à la tâche, mais la mort qui l’a frappé alors qu’il modelait la statue de Mgr Gonindard, ne l’a pas surpris. Il n’était pas seulement, en effet, un grand artiste, il était encore et surtout un chrétien fervent.

Durant sa longue et douloureuse agonie, il ne laissa jamais échapper la moindre plainte. A sa famille qui l’entourait des soins les plus affectueux et lui demandait un jour s’il souffrait beaucoup, il se contenta de répondre : < oui beaucoup, mais si j’étais attaché sur une croix comme mon divin modèle, le souffrirais davantage encore. Si le Bon Dieu voulait me pendre dans son Paradis, je serais bien heureux, mais je le sers bien mal en ce moment >. Et jusqu’à la fin sur ses lèvres non cessé, comme son cœur, de murmurer la prière, celle du sacrifice et de la résignation à la volonté divine. C’était un Saint, disait à ses enfants le Père Rédemptoriste qui l’avait préparé au dernier voyage, et son âme était un véritable trésor. »

 

Les deux articles que nous venons de lire, nous suffirons pour juger le caractère de cet artiste dont la vie pourrait se résumer en deux mots : ART et PIETE.

Nous allons essayer néanmoins de retracer cette existence et étudier ces œuvres remarquables, Malheureusement, voila 25 ans déjà que J.M. Valentin est mort et la plupart de ses contemporains ont également disparu. Bien des documents nous manquent, ce ne sera donc pas sans difficultés et sans patience si nous arriverons à réunir les renseignements nécessaires à ce travail. Mais notre but est modeste. Nous n’avons pas l’intention de faire une œuvre littéraire mais plutôt documentaire, œuvre dédiée à ses petits enfants et arrière petits enfants afin qu’ils sachent quel homme était leur grand père.

 

Bourg des Comptes est un des plus jolis coins de l’Ille et Vilaine. Ce village jouit d’une célébrité méritée dans le paysage pour l’agrément, la grâce, la fraîcheur de ses paysages. La Vilaine y coule doucement, ses rives sont variées. Talus à pic, roches bleues, collines boisées : c’est là que J.M. Valentin vint au monde en 1823.

Né de parents des plus modestes, son père était menuisier de son état, mais ouvrier de goût et de talent, si l’on peut dire, dans son métier. Est-ce ce goût simple du beau qu’il transmis à son fils et qui le développa, toujours est il que J.M.Valentin sous la seule impulsion de la nature intelligente et sensible révéla de bonne heure un tempérament d’artiste, passant son temps tout enfant, à dessiner et à modeler.

Il fut remarqué par un homme riche et bien placé à Bourg des Comptes, M Goron, qui s’intéressa à lui, lui donna les premières notions et le poussa dans cette voie. C’est ainsi qu’il entra à l’Ecole des Beaux Arts de Rennes, où, tout de suite, les maîtres découvrirent en lui un véritable artiste.

 

Après quelques années d’études, il obtint une bourse et vint compléter son éducation à Paris, c’était en 1845.

Il existait à cette époque à Paris deux écoles de sculpture : l’école des Beaux Arts et l’atelier de Rude, ce sculpteur au génie original et puissant qui compte parmi les plus grands maîtres de l’école française.  Aux éléments toujours turbulents de l’école des Beaux Arts, Valentin préféra entrer dans l’atelier de Rude et c’est avec ce maître incontestable qu’il travaillera pendant plusieurs années.

Sa vie à Paris ne fut qu’un labeur continuel. D’ailleurs, ses revenus étaient des plus modestes, avec la pension que lui faisait la ville de Rennes, quelques cents francs par an. Mais il est vrai que dans ce temps là, la vie était bon marché et n’avait de commun avec celle de nos jours. Néanmoins, fit il abstraction de tout plaisir. Il se vantait de n’avoir jamais mis les pieds dans un théâtre. Au sorti de l’atelier, il étudiait chez lui, non seulement la sculpture, mais l’anatomie, l’histoire, les lettres. Il complétait l’éducation un peu rudimentaire qu’il avait reçue dans son enfance, il apprenait le grec et surtout le latin, car son tempérament le portait déjà vers l’art religieux. Il étudiait les maîtres anciens, faisait de longues visites dans les musées.

 

C’est après ces années de travail et d’études qu’il retourna dans son pays natal et vint se fixer à Rennes. Il commença la liste des travaux de ses œuvres aux sentiments si profondément religieux qui enrichirent si remarquablement la Bretagne.

Après avoir longtemps habité dans la rue Haute, il acquit un terrain assez important dans le faubourg d’Antrain, exactement 9 ruelle Pinsonnette. Ces quartiers se sont complètement transformés depuis. Il fit bâtir un immeuble avec vaste atelier où il vint se fixer vers 1871. Il passa là si l’on peut dire, les plus belles années de sa vie en compagnie de notre chère mère qu’il admirait et de sa nombreuse famille car nous étions huit enfants.

Bien des années se sont écoulées depuis cette époque et cependant je me souviens comme si c’était hier. J’étais bien jeune alors, moi qui écris ces lignes, près de quarante ans se sont passés et je me souviens encore avec douceur de cette demeure calme et tranquille, de ce grand jardin où nous jouions tout enfants, de ces grands ateliers au haut vitrail où entouré de ses collaborateurs, l’artiste Valentin travaillait en silence. Je sens que ces souvenirs de ma première enfance renaissent en moi se grave de plus en plus dans ma mémoire. Certains font table rase du passé, mais moi c’est avec douceur que je me rappelle mes premières années.

Oh, la maison était nombreuse, nous étions là frères et sœurs, cousins, cousines, amis et tout ce petit monde s’entendait si bien. Je crois, qu’il y avait là pour nous gouverner, un père dont le respect s’imposait si bien et une mère dont la douceur et le dévouement étaient extrêmes : ce qui faisait dire à notre père : votre mère n’a qu’un seul défaut elle est trop bonne.

Je me rappelle, nos jeux d’enfants, nos parties folles dans le grand jardin. Je vois encore l’artiste sous la tonnelle ombragée où il allait s’asseoir la journée terminée et où nous allions le rejoindre. Je vois encore le grand salon où nous n’entrions qu’aux grands jours et en silence. Au murs, quatre grandes gravures : la Création du Monde, le Paradis terrestre, le Jugement Dernier, l’Enfer. Sur la cheminée, un groupe de l’artiste, un piano,quelques peintures. Combien d’artistes, de gens de lettres, de prêtres de tous rangs, d’évêques ai-je vu entrer dans ce salon austère qui rappelle un peu le parloir d’une communauté.

Je voudrais pouvoir raconter toutes ces petites histoires de cet heureux âge mais nous sortirions alors de notre but qui est exclusivement l’analyse des œuvres de ce Maître incontesté.

Si l’empire avait favorisé beaucoup les arts, il n’en fut malheureusement pas de même de la République, surtout au point de vue religieux. Vers 1879 commença au contraire, une véritable guerre de religion et J.M. Valentin ne tardera pas à subir durement le contre coup. Aussi, crut il bien faire, écoutant les conseils d’amis, en venant se fixer à Paris. Il espérait ainsi travailler davantage et aussi créer des situations à ses enfants. Il vendit donc se bien et arriva dans la capitale en 1883. Il loua un atelier d’artiste 81 Bd Montparnasse où il resta jusqu’à la fin de ses jours.

 

Nous allons maintenant reprendre et étudier ses principales œuvres.

Un des premiers grands travaux exécuté par Jean Marie Valentin se trouve dans l’église de Saint Servan. Cette église commencée en 1732, sur les dessins de l’architecte Frezier, ouverte dix ans plus tard, ne fut achevée qu’en 1842. Elle forme une longue basilique sans transepts, terminée en hémicycle et divisée dans sa longueur par une élégante colonnade d’ordre dorique qui profile autour du sanctuaire, et dont les hautes arcades en plein centre sont décorées de belles fresques dues au pinceau de Mr Duveau. L’intérieur de cette église est d’un aspect grandiose et vraiment splendide qui l’emporte sur beaucoup de cathédrale.

En 1858, l’Empereur de passage à Saint Servan fit don à l’église de 40 000 francs pour l’exécution de différents travaux d’art, dont la chaire qui fut confiée à J.M. Valentin. Cette chaire monumentale, en pierre sculptée, mérite vraiment une description spéciale. C’est un travail d’art de premier ordre : la statue qui supporte la cuve représente le génie du mal. Elle est agenouillée et se cache la figure entre ses mains en signe de confusion, comme foudroyée sous le feu de la parole. Elle a été inspirée par l’artiste par ces mots : «  que Dieu de paix foule Satan à vos pieds. » A l’entrée des deux escaliers tournants qui conduisent à la chaire, sont sculptés deux bas reliefs représentant la Justice et la Miséricorde. Sur la rampe de chaque coté, les quatre grands prophètes : Isaïe, Jérémie, Ezéchiel, Daniel. Au centre de la cuve, Jésus apaisant les flots. Sur la façade, les quatre évangélistes. Au fond de la chaire, le Bon Pasteur rapportant les brebis égarées. Deux anges cariatides, dont l’exécution est ravissante, supportent le couronnement. Au dessus de la corniche, se détachant les armes de l’église, de l’archevêque de Rennes et de la ville de Saint Servan. La partie supérieure se termine par un piédestal sur lequel repose une dernière allégorie, c’est une statue de la religion debout et enseignant.  D’autres figures et ornements complètent ce terme biblique et chrétien si bien développé par le ciseau du sculpteur breton : travail d’une délicatesse inouïe.

Outre cette chair, Valentin exécuta encore dans cette église toute la galerie de statues qui sont placées devant les pilastres et qui mériteraient également d’être détaillées, et enfin, derrière l’autel de la Vierge,un groupe de l’Assomption très remarquable qu’éclaire un effet de lumière des plus heureux.

Ne quittons pas la région sans aller jusqu’à Saint Malo. Nous y trouverons le monument élevé à la mémoire de l’Abbé Huchet qui fut longtemps curé à la cathédrale. Décédé en septembre 1978, ses paroissiens décidèrent de lui élever un monument qui fut confié à J.M. Valentin.

 

Il ne nous reste plus maintenant qu’à jeter un coup d’œil à l’église de Dinard : le maître autel avec ses six statues de pierre et la chaire en pierre, ornée de trois grandes statues, de plusieurs statuettes et bas reliefs très remarquables.

L’érection du maître autel de l’église de Dinard fut achevée au mois de septembre 1866. Il fut l’admiration des étrangers qui chaque année viennent en si grand nombre le contempler.

Le tombeau de l’autel est un magnifique bas relief représentant Jésus Christ donnant la communion à ses apôtres.  A droite et à gauche du tabernacle, on voit deux anges adorateurs également en bas relief. Des guirlandes de fleurs et de gracieuses arabesques finement fouillées courent autour du monument. Des deux cotés, les grandes statues de Saint Enogat et de Saint Clément, patrons de la paroisse, semblent protéger l’autel du sacrifice. Enfin, comme couronnement, le sujet principal représente la grande scène du Stabat Mater : Jésus en croix confie avant de mourir, sa mère au disciple bien aimé. Cette scène est toute vivante, on croirait assister au calvaire.

La chaire en pierre blanche, comme l’autel, remarquablement sculptée, est surmontée de la statue du Saint Sauveur, à sa droite se trouve la statue de Saint Pierre, à sa gauche, celle de Saint Paul. Un double escalier lui donne accès. Elle fut inaugurée le dimanche 2 septembre 1877 à la messe de 9 heures par un sermon de l’abbé Launay, vicaire de Notre Dame de Rennes.

 

Ne quittons pas la région sans aller visiter Saint Jouan des Guérêts, charmant village situé au bord de la Rance.

En 1878, J.M. Valentin fut appelé à fournir des plans pour l’érection d’une chaire. Cette chaire très remarquable fut terminée en fin 1879 et inaugurée le 1er janvier 1880. Nous remarquerons également dans cette même église, l’autel coté midi, orné de trois statues : Saint Joseph, Saint Pierre et Saint Louis. Cet autel est antérieur à la chaire et doit dater de 1875.

Le maître autel de cette église fut confié au sculpteur Hérault de Rennes, les statues sont signées Savary.

 

Parmi les plus beaux monuments de la Bretagne qui furent confiées à Jean Marie Valentin, il faut citer en premier lieu, le monument de Saint Yves érigé dans la cathédrale de Tréguier (22) en 1890.

Depuis les tristes jours où le féroce bataillon (d’Etanyses) avait détruit le tombeau de Saint Yves dans la belle cathédrale de Tréguier, le culte du grand Saint n’était resté debout, pour la Bretagne, que dans le cœur des compatriotes, aussi fidèles dans leur amour qu’enraciné dans leur foi.

Le sabre et la pioche des vandales avaient tout détruit en 1794. Cependant, les Pardons de Saint Yves n’étaient jamais tombés dans l’oubli. On avait vu à maintes reprises des masses de pèlerins venir invoquer le Grand Saint, mais si ces bandes, couvertes de poussière, épuiser de fatigue et priant en silence, était un spectacle édifiant. Elles n’apportaient avec elles ni cet éclat, ni cette splendeur, ni ce cachet grandiose dont la foi des peuples aime à se parer dans ces manifestations publiques. A cet ardent amour, il fallait un monument.

Monsieur Bouché le comprit et J.M. Valentin répondit à son appel en consacrant à cet œuvre sa science et son talent. Il fut aidé dans son travail par Mr Devrez, architecte de Notre Dame de Paris.

Ce monument est en pierre blanche, les degrés et la table sont en granit. L’architecture est du XXè siècle, plus de cinquante statues le peuplent de la base au sommet.

 

Le Bienheureux Yves est couché sur le coffre qui sert de sarcophage. Il est revêtu de son grand manteau blanc, ses épaules sont recouvertes de son chaperon, sa tête repose sur un quartier de roche soutenu par deux anges qui se penchent légèrement sur la figure du Saint, et qui semblent attendre son âme pour la portée au ciel. On dirait que l’artiste a été présent aux derniers moments du Bienheureux.

Sur la face latérale du sarcophage, l’artiste a rassemblé les parents, les amis, les dévots du Saint : Hélouri et Azo de Kermartin ; Riwallo, le Barbe et sa femme Dathovada ; Catherine Hélouri sa sœur ; Charles de Blois et l’évêque Alain de Bruc ; l’Archidiacre de Rennes ; Guiomar Morel le cordelier de Gingamp et Catherine Autrel la jeune miraculée de Plestin ; enfin les glorificateurs du Bienheureux : Philippe de Valois et Clément XI, Jean V et l’évêque de Saint Brieuc. Ensuite, les protomartyrs de l’Armorique : Donatun et Rogatun de Nantes, les rois bretons : Judicaël et Salomon et enfin Saint Gildas de Ruiz, le premier historien de la race bretonne.

Plus haut sur les tympans et les pilastres de l’édicule : le bon Pasteur et la Vierge à l’Oiseau, puis les anges aux ailes blanches déployées, qui sonnent de l’olifant et qui portent les insignes symboliques.

Partout excellente, souvent exquise, la sculpture d’ornement   dans le tombeau de Saint Yves, est comparable aux meilleures œuvres de ce genre de l’époque du duc Jean V.

Cette œuvre fut exposée au salon de la société des Artistes Français en 1888.

Les 7, 8 et9 septembre 1890 eurent lieu à Tréguier de grandes fêtes pour l’inauguration de ce monument qui marqueront dans les annales  du pays. De nombreux évêques et cardinaux honorent ces fêtes de leur présence. Parmi eux, nous pouvons citer : son éminence le Cardinal Place archevêque de Rennes, Monseigneur Gonindard archevêque de Sébaste, Monseigneur Fallières évêque de Saint Brieuc et de Tréguier, Monseigneur Bécel évêque de Vannes, Monseigneur Fréppel évêque d’Angers, Monseigneur Potron évêque de Jéricho… Plus de 800 prêtres et une foule innombrable de fidèle assistèrent également à ces fêtes.

 

La cathédrale de Rennes, d’origine très ancienne, mais construite en partie au XVIIème siècle, n’offre rien de remarquable au point de vue architecture. Cependant, l’intérieur est richement décoré. Monseigneur Saint Marc y consacra une partie de sa fortune personnelle.

Nous y remarquerons du sculpteur Valentin, en premier lieu, le Chemin de Croix qui forme autour de l’église, de magnifiques bas reliefs en pierre sculpté de grandeur naturel.

 

Monseigneur Saint Marc étant décédé le 26 février 1878 après avoir occupé dignement pendant 36 ans le siège de Saint Amand et de Saint Melaine, les fidèles résolurent de lui élever un monument dans la cathédrale. Ce monument fut confié également à J.M.Valentin.

Le Cardinal est représenté à genoux, les mains jointes, les traits fins, la figure expressive du Vénéré Prélat sont parfaitement rendus par le marbre qui ressort vivement sur le fond mat de la muraille. La capa magna est  jetée sur les épaules du Cardinal et retombe derrière lui en longues draperies. La pause est des plus heureuses et l’ensemble de la statue fait honneur au ciseau de l’artiste.

L’inauguration de ce monument eu lieu le 6 mai 1884. Un discours remarquable fut prononcé par Mgr Bécel, évêque de Vannes. Jamais la ville de Rennes n’avait réuni un si grand nombre d’évêques et d’archevêques. L’église était magnifiquement décorée, de nombreux écussons surmontés d’étendards aux couleurs du Sacré Cœur et de Saint Marc.

 

Nous devons également remarquer dans la cathédrale de Rennes, le monument élevé à la mémoire de Monseigneur Gonindard. Le regretté archevêque à demi couché tenant la crosse étendue près de lui, tandis que la droite bénit. Cette statue est d’un effet saisissant, surtout si l’on se rappelle que Monseigneur Gonindard est mort dans l’exercice de ses fonctions en tournée pastorale.  Ce monument fut érigé dans la cathédrale en 1897 après la mort du sculpteur Valentin, ce fut sa dernière œuvre.

 

L’église Saint Melaine devenue Notre Dame depuis 1845, ancienne église abbatiale, édifice du XI au XIIIème siècle, est située sur un des points des plus élevés de Rennes et la Vierge qui surmonte la tour domine toute la ville. Nous y remarquons quelques œuvres de l’artiste Valentin. D’abord dans la même tour, deux grandes statues en pierre qui furent érigées en ?  Il s’agit de Saint Pierre et Saint Amand.

En entrant à droite, nous remarquerons tout de suite le tombeau de l’Abbé Meslé, saint homme ancien curé de cette paroisse. A l’intérieur, une statue de la vierge et deux anges au maître autel.

 

Si nous devions invoquer tous les travaux qui furent exécutés par l’artiste Valentin, la liste serait longue. Rien que dans la ville de Rennes, nous en rencontrions à chaque pas, citons donc au hasard : Dans l’église Saint Germain, l’autel de la Vierge orné de douze statues, dans l’église de Saint Helier quatre  statues et un groupe, à la chapelle du Collège Saint Martin un ponton au dessus de la porte principale, sculpture décorative. Chapelle de l’œuvre de la Jeunesse quatre grandes statues. Chez les Petites Sœurs des Pauvres, à la chapelle des Carmes, à la chapelle des Missionnaires, Nous trouverons également les œuvres de l’artiste à l’hospice Saint Melaine, une grande statue dans le jardin du Séminaire. A Saint Laurent, Trois grandes statues, deux bas reliefs et deux statuettes…  

 

L’église de Notre Dame de Caen possède un monument assez remarquable du Vénérable Jean Eudes. L’inauguration de ce monument eu lieu le 23 août 1885 sous la présidence de Mgr l’évêque de Bayeux. Le vénérable Jean Eudes est pieusement  agenouillé au pied de la Sainte Vierge qui tient le Divin Enfant dans ses bras, attire surtout l’attention : l’Enfant Jésus se penche vers le Père Eudes, de la main gauche, il semble lui offrir son cœur et de la droite, il montre celui de sa mère. Ce groupe vraiment artistique parle aux yeux et encore plus au cœur.

 

Parmi les œuvres de J.M. Valentin, nous citerons encore la statue de Mgr Saint Marc élevée dans l’église de Bourg des Comptes, pays natal du sculpteur breton. L’inauguration de ce monument eu lieu le 19 septembre 1880. Le journal de Rennes du 22 septembre 1880 la relate aussi : « dimanche dernier, une touchante solennité réunissait à Bourg des Comptes une nombreuse assistance. Ce jour là avait lieu l’inauguration de la statue élevée à la mémoire du Cardinal Saint Marc ». Dès le matin, les habitants des environs descendaient dans la petite ville. Un grand nombre d’ecclésiastiques de divers points du diocèse arrivait après les offices paroissiaux.

A 10 heures, une grande messe solennelle était célébrée par  Mr l’Abbé Quérard secrétaire de l’archevêque. Aussi, le clergé de la paroisse auquel s’était joint tous les ecclésiastiques présents et s’est rendu processionnellement au devant de Mgr l’Archevêque de Rennes et Mgr l’Evêque de Vannes.

Mr le Curé de Bourg des Comptes leur a souhaité la bienvenue. A l’issus du récit pontifical et devant un auditoire que ne pouvait contenir en entier l’église trop petite, Mgr l’Archevêque de Rennes a fait une courte allocution et a annoncé que le panégyrique allait être prononcé par Mr l’Abbé Villain, vicaire générale qui fut l’ami de Mgr Saint Marc.

En termes émus et avec une véritable éloquence, il a retracé la vie du Vénérable Prélat, s’attachant surtout à le montrer comme l’enfant de la Bretagne.

 

Nous ne saurions terminer ces lignes sans rendre hommage au talent de l’artiste qui a exécuté cette statue. Monsieur Valentin a produit là une œuvre qui lui fait le plus grand honneur et qui lui attirera certainement les compliments les plus mérités de tous les véritables connaisseurs.

Cette statue en marbre blanc représente le Cardinal debout, de grandeur naturelle et revêtu de la cappa magna, bénissant les fidèles. Les traits de la figure sont d’une ressemblance frappante et reproduisent exactement le visage de celui que nous aimions tant avoir parmi nous.

Elle est élevée dans un des côtés de la ravissante église de Bourg des Comptes, près du tombeau de la famille où repose Madame Brossay de Saint Marc.

Ne quittons pas l’église de Bourg des Comptes sans jeter un coup d’œil sur le maître autel qui fut exécuté en partie  par Valentin ainsi que les cinq statues qui ornent l’église.

 

Une des plus belles chaires érigées par Valentin est certainement celle de Bain de Bretagne, toute en pierre blanche finement ornée de bas reliefs et d’ornements, elle est d’un effet saisissant.

Nous remarquons dans la même église, le maître autel avec comme tombeau, un bas relief en marbre blanc représentant la cène,  rappelant le fameux tableau de Léonard de Vinci. De chaque coté de l’autel, un ange en pierre.

Sous les autels latéraux, sont sculptés une descente de croix et le Bon Pasteur. Plusieurs statues du même auteur existent également.

 

L’église de la Guerche de Bretagne possède également un monument remarquable : celui de l’Abbé Fourré. Après la mort de ce vénérable prêtre en 1879, l’architecte fut appelé en mars, il était d’avis de faire une statue couchée, mais un projet de statue couchée que présenta J.M. Valentin lui fut préférée et exécutée.  Un Saint Joseph de grande dimension se trouve également dans cette église.

 

Parmi les œuvres du sculpteur Valentin, nous citerons encore quelques unes dont nous avons été assez heureux de retrouver les esquisses faites par l’artiste lui-même, et qui comptent, bien qu’étant érigées dans les coins les plus reculés de la Bretagne, parmi les meilleurs :

A Renazé (53), un autel du Saint Rosaire, plusieurs statues et deux bas reliefs.

A Brusvily (22), trois autels et une chaire en pierre.

Forges la Forêt possède également dans son église des travaux assez conséquents de J.M. Valentin entre autre : trois autels ornés de statues et de bas reliefs.

Brain sur les Marches (53), deux autels en pierre, deux bas reliefs et plus de dix statues.

Enfin, dans l’église de Plélan le Grand, nous citerons encore : trois autels, cette église possède aussi huit statues, trois bas reliefs et un groupe en plâtre.

 

Il n’est pas un coin de Bretagne où l’artiste Valentin n’a laissé trace de son œuvre. Il n’est pas une église qui ne possède l’empreinte de son talent. Si nous énumérions tous les monuments, toutes les statues, tous les ouvrages qui sont sortis des mains de l’artiste, la liste serait longue : Dinan, Saint Brieuc, Sainte Anne d’Auray, Pontmain, Saint Meen le Grand, tous les lieux de prières et de pèlerinages possèdent  de ses œuvres. Guingand, Lannion, Sillé le Guillaume, Caen, Granville, Redon, Vitré, Dol de Bretagne, Plélan le Grand possède également des traces de son talent.

Toutes ces œuvres dénotent un travail assidu, une persévérance sans borne et un tempérament remarquable d’artiste.

 

Nous clôturerons ce petit abrégé en faisant suivre quelques photographies de ses compositions et quelques croquis qui achèveront de nous fixer sur son goût, sur la façon légère et pleine de caractère de son dessin.

 

Terminons enfin, en souhaitant que ce petit ouvrage ne soit pas inutile, qu’il soit conservé précieusement comme un souvenir de famille et qu’il puisse servir un jour, à faire prendre rang dans l’histoire artistique de la Bretagne de cet intéressant artiste.

                                                                                                                       P.V.          


 

 Quelques extraits de la thèse de doctorat par l’Abbé Pocquet du Haut Jussé (1984).  « Le Mobilier Religieux au 19ème siècle en Ille-et-Vilaine ».

 

Jean Marie Valentin

 

Le plus marquant de ces statuaires, pour la deuxième partie du 19ème siècle, est incontestablement Jean Marie Valentin. Il se fait remarquer tant par l’abondance de sa production que par la qualité et la personnalité de son œuvre.

Sa vie et sa personnalité nous sont bien connues non seulement par son œuvre, mais aussi par un mémoire, rédigé par son fils Paul vers 1920……Dès son enfance, Jean Marie Valentin manifesta des dons artistiques. Mr Garon s’intéressa à lui, lui donna les premières notions et le poussa dans cette voie. C’est ainsi qu’il entra à l’école des Beaux Arts de Rennes. A cette époque, Jean Baptiste y enseignait la sculpture.

En 1845, il obtint une bourse pour aller à Paris compléter sa formation et entra dans l’atelier de Rude. Il écrit lui-même au maire de Rennes (16 mars 1845) : «  Mr Rude est un homme d’un grand mérite, retiré du monde et ne s’occupant pour ainsi dire que de son atelier, du reste le plus fort de Paris. »…..Notre jeune artiste menait à Paris une vie de labeur. « Au sortir de l’atelier il étudiait chez lui, non seulement la sculpture, mais l’anatomie, l’histoire des lettres, il apprenait le grec, et surtout le latin car son tempérament le portait déjà vers l’art religieux ». En juillet 1845, il obtint un certificat de F. Rude et Lanno : « Nous certifions que Mr Valentin, élève sculpteur, a des dispositions heureuses, qu’il est laborieux, en voie de progrès, et qu’il y a lieu d’espérer qu’au mois d’octobre prochain, il pourra obtenir une place à l’Ecole Royale des Beaux Arts ».

 

Après ses années d’études, il vint se fixer à Rennes, d’abord rue Haute, puis ruelle Pinsonnette en 1871…….

 

A partir de 1879, les mentalités ayant changées, les commandes se firent plus rares et il cru bien faire en venant se fixer à Paris où il arriva en 1883…….   

 

Nous ne pouvons énumérer ici toutes ses œuvres. Signalons les plus importantes. Ce sont d’abord des statues et des groupes. L’église Sainte Croix de Saint Servan en contient un bon nombre. Toutes les statues des piliers de la nef sont de cet artiste (1863) : un Ecce Homo, une Mère des Douleurs, Saint Jean l’Evangéliste, Saint François de Sales, Sainte Cécile, Saint Jean Baptiste, Saint Etienne, Saint Godefroy, évêque d’Aleth, hommage évident à Mgr Godefroy Brossay Saint Marc, Sainte Barbe, et dans le cœur, Aaron, Melchisédech et deux anges. Du même artiste est également le groupe de l’Assomption au chevet de l’église (1877). …..

 

Le groupe de Crucifixion, à Dinard (1866) figurant primitivement au dessus du maitre autel, très abimé par les bombardements de 1944, et déposé actuellement au bas de l’église. Le Christ n’est pas un condamné pitoyable mais reste majestueux. Marie est debout, douloureuse mais digne, ainsi que saint Jean. Seule Marie Madeleine s’est laissée tomber à genoux.

 

Jean Marie Valentin a fait aussi des ensembles architecturaux assez remarquables. Citons la chaire de cette même église Sainte Croix de Saint Servan (1859). D’une architecture plutôt classique et même électrique, elle est bien dessinée, exécutée tout en pierre. Des personnages en décorent les éléments : comme socle, l’esprit du mal terrassé ; sur les rampes, les quatre grands prophètes ; sur la cuve, les quatre évangélistes et un bas relief, la Tempête apaisée, d’un dessin animé ; au dossier, le Bon Pasteur. Deux anges soutiennent l’abat voix dominé par une statue allégorique de la foi ou de la religion. Elle est signée sur le socle « Valentin Frères architectes et sculpteurs » et porte sur le fronton : « donnée par l’Empereur »……

On a demandé au même artiste des monuments funéraires pour les curés les plus vénérés, comportant la statue du défunt, généralement à genoux, ainsi les monuments de Mr Huchet à la cathédrale de Saint Malo (1878), de Mr Aubrée à Notre Dame de Vitré (1882), de Mr Fouré à la Guerche de Bretagne (1878), de Mr Meslé, au pied de la tour de Notre Dame à Rennes (1873), Mgr Brossay Saint Marc est représenté debout, en marbre blanc, dans l’église de Bourg des Comptes (1880), paroisse natale de l’artiste et de son modèle, et à genoux dans sa cathédrale à Rennes (1883). Enfin, nous avons dit que J.M. Valentin eut le temps de terminer la maquette du monument de Mgr Gonindard (1896) pour la cathédrale de Rennes. Le monument fut exécuté dans son atelier après sa mort.

Dans la même cathédrale, il fit encore le Chemin de Croix (vers 1870). Signalons, à l’extérieur du diocèse, à Tréguier, le tombeau monumental de Saint Yves (1888), dont le gisant présente un beau visage de vieillard. 

 

Jean Marie Valentin se faisait aider, pour la sculpture d’ornement, par son frère cadet Antoine qui habitait ruelle Pinsonnette. C’est par délicatesse pour ce frère qu’il signait souvent ses œuvres « Frères Valentin), alors que Jean Marie était de beaucoup l’auteur principal. C’est animé de la même modestie qu’il laissa Hérault signé la chaire de Notre Dame de Vitré, alors que lui même ne signa même pas les statues. Artiste modeste et sensible, tel nous apparaît Jean Marie Valentin dont l’œuvre, immense, n’a pu être tout entière énumérée ici.

 

 

 

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