Épinac : Le Château

Roland Niaux

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EPINAC

Le Château

71.18.190

Situation

Arrondissement = Autun

Canton = Epinac

Carte IGN au 1/25000e = 2924 Est - Epinac

Coordonnées Lambert = 765,25/35 - 223,65/75 ; alt.350

Cadastre 1844 = F1 n°249 à 252

Cadastre rénové, édition 1986 = AB n°105 à 112

Diocèse = Autun

Ancien archiprêtré = Couches

Paroisse = Epinac, autrefois Monestoy, avec église du XIe.siècle, sous le vocable de Saint Pierre, agrandie au XVe siècle et démolie en 1850 pour être remplacée par une église plus vaste, construite sur le même emplacement mais perpendiculairement à l'église primitive. Celle-ci n'était qu'à quelques mètres (60 mètres) de la tour d'angle située à l'extrémité Est du mur d'enceinte de l'espace castrai. Le château était construit sur une éminence rocheuse dominant d'environ 25 mètres le cours de la rivière "la Drée" qui coule à 150 mètres au sud-ouest de l'enceinte. Une importante voie gallo-romaine, puis médiévale contourne de l'ouest au nord la butte castrale. Il s'agit de la voie d'Autun à Beaune ou à Molinot, où l'on rejoignait la route de Paris.

Toponymie

Le château, le village qui l'entourait, se nommait Monestoy, dans les plus anciens documents écrits connus remontant au début du XIIIe siècle. C'est ce nom que prit initialement la famille seigneuriale qui occupait le château.

Monestoy est une probable déformation de monasterium qui donne généralement Moutiers. On ne connaît pas d'autre établissement religieux sur la paroisse que le petit prieuré de Montartaux, à 3 km à l'Est, sur les hauteurs de Ressille. Il dépendait du prieuré clunisien de Mesvres. On ne peut assurer que ce soit l'origine du nom de Monestoy.

Monestoy est devenu Epinac au XVIIe siècle, du nom du seigneur de l'époque, Louis II de Pernes, comte d'Epinac.

Vestiges

Le château se compose actuellement d'un corps de bâtiment formant un angle très ouvert dont les deux bras mesurent chacun environ 15 mètres de longueur et 9 mètres de largeur. Ce bâtiment comporte un rez-de-chaussée, un étage et des pièces sous combles. A chaque extrémité du bâtiment se trouve une grosse tour carrée à cinq étages. Ces deux tours ont été construites au XIVe siècle mais souvent restaurées. Ce n'est là qu'une partie du château initial qui, jusqu'au début du XIXe siècle, comportait deux ailes en retour vers l'est ainsi qu'on le voit sur le plan parcellaire de 1810. La grosse tour du nord paraît être la plus ancienne. La tour sud est encore garnie de mâchicoulis. Elle défendait l'entrée principale, avec une grosse tour aujourd'hui disparue. Une enceinte extérieure, avec 6 tours à l'ouest et des fossés tout autour complétaient l'ensemble défensif. Une autre tour ronde fermait le dispositif vers l'est. La basse cour, au sud, comportait les bâtiments de service, grange et écuries. On peut encore y voir, au-dessus d'un portail, les armes des Rolin, d'azur à trois clefs d'or posées en pal.

Datation

Les premiers seigneurs connus de Monestoy apparaissent au XIIIe siècle. On trouve en 1248, un testament de Jean de Monestoy, chevalier, et une donation par Pierre de Monestoy (Paul Muguet, Le Prieuré du Val Saint-Benoit). La seigneurie de Monestoy dépendait, au XIVe siècle, de Molinot. Un dénombrement de la terre et seigneurie de Molinot par Guichard Dauphin, seigneur de Jaligny, baron de la Ferté Chauderon, sénéchal du Nivernais, seigneur de Molinot, en date du 28 octobre 1382, indique que dépend de ladite seigneurie "ce que tient Robinat de Flaigny en la ville et maison de Monestoy à cause de sa femme et des hoirs de feu Philippe de Monestoy" (archives départementales-Côte d'Or : B10529). A peu près à la même époque, deux actes de partage de la seigneurie de Monestoy donnent quelques indications sur le château :

1° - partage, du dimanche après la fête de saint Luc, évangéliste, 1370, entre Jehanne Chevrère, veuve de Hugues de Monestoy et Philippe de Monestoy son beau-fils. Le château comporte la "Tour neuve" et deux tourelles.

2° - Partage, du mercredi après la saint Denis 1401, entre Agnès de Ruffey, agissant tant pour elle que pour ses enfants Pierre, Philippe, Guy et Marie, coseigneurs de Monestoy et Agnès de Blaisey, veuve de Philippe de Monestoy. Dans la part d'Agnès de Ruffey, la tour d'entrée et les murs du château jusqu'à une petite tourelle et les bergeries. Dans la part d'Agnès de Blaisey, deux grosses tours carrées en pierre et ce qui est construit entre ces deux tours.

De ce qui précède, on peut déduire que les deux tours existant actuellement et le bâtiment entre deux, visés par le partage de 1401 dans la part d'Agnès de Blaisey, sont initialement des constructions du dernier tiers du XIVe siècle.

Après le décès d'Agnès de Blaisey, la seigneurie de Monestoy appartenait pour moitié à Guillaume de Saint-Mesme, et pour moitié à Guyot de Mypont. Cependant, le duc de Bourgogne Philippe-le-Bon ayant confisqué la moitié appartenant à Guyot de Mypont en raison de "certains crimes" commis par ce dernier, donna cette part à son conseiller et chambellan Pierre de Beffroymont, seigneur de Charny. C'est ce qui résulte d'un inventaire des "rentes, censés et héritages, avec la prisée d'icelles, que Guyot de Mypont, écuyer, tenait en son vivant lorsqu'il fut mis es prison de Talant, lesdits biens sis à Monestoy, Mypont et Puligny", ledit inventaire fait en l'an 1423, ainsi que l'acte de donation fait à Leyde en Hollande, le 27ème jour de novembre, l'an de grâce 1428 (Archives de la Côte d'Or B 525 et B 490). Le 5 mai 1430, Pierre de Beffroymont (ou Baufremont) seigneur de Charny en Auxois et de Molinot et dame Anne de Saulx son épouse, vendirent à Nicolas Rolin, seigneur d'Authume, chancelier de Bourgogne, la moitié par indivis des châtel, terre et seigneurie de Monestoy, en toute justice, pour le prix de mille salus d'or, avec reconnaissance par le vendeur que la terre de Monestoy ne meut pas de Molinot, mais du fief du duc (Arch. de la SE, série I, dossier Epinac).

Sans doute le chancelier Rolin dut-il acquérir peu après l'autre moitié de la seigneurie de Monestoy, car celle-ci paraît être entièrement en la possession de son fils Antoine en 1474 : "noble et puissant seigneur messire Anthoine Rolin, chevalier, seignour de Monestoy, tient sadite seigneurie de Monestoy, en toute justice, mais du fied est débat entre le procureur de mondit seignour (le duc de Bourgogne) et le seignour de Molinot" (G.Dumay, Etat militaire et féodal...en 1474). Antoine Rolin, frère du cardinal Jean Rolin, céda Monestoy à son frère aîné Guillaume, qui le laissa à son fils François. François Rolin, marié à Jeanne de Bourbon, eut deux fils et une fille. Son fils Jean prit le titre de seigneur de Beauchamp, Monestoy et Savoisy. L'inventaire effectué en 1527, après sa mort, et qu'il serait trop long de transcrire ici, donne une idée exacte de l'importance du château à cette époque et de son mobilier dans chacune de ses pièces. On y voit, entre autres, qu'il existait une chapelle sous le vocable de sainte Anne. Jean Rolin laissa une succession très obérée. Sa fille, Suzanne, épousa Nicolas Chambellan, fils du principal créancier. Ils eurent une fille unique, Magdeleine, qui épousa Jean d'Epinac et transmit Monestoy à son fils Gaspard.

Gaspard d'Epinac épousa en 1588 Gabrielle de Vaudrey. Leur fille Claude épousa, en 1630, Louis de Pernes, colonel d'infanterie, gouverneur de Saintes, élu de la noblesse aux Etats Généraux de Bourgogne. Par son contrat de mariage, elle imposa à son mari la condition de prendre, pour lui et les siens, le nom et les armes de la maison d'Epinac. Gabrielle de Vaudrey, devenue veuve institua pour héritier universel son petit-fils Louis II de Pernes. Celui-ci obtint, en août 1656, des lettres patentes du roi érigeant les seigneuries de Monestoy, la Drée, le Châtelot, Epertully, Thury, en comté "qui sera dorénavant appelé le comté d'Epinac, au lieu et villaige de Monestoy, où se trouve un fort chasteau dominant le bourg". Louis II de Pernes, comte d'Epinac, fit renouveler le terrier de cette seigneurie à partir de 1660. Dans la déclaration des domaines seigneuriaux on lit : "Premièrement le château dud. Epinac consistant en un donjon et un pont levy à l'entrée d'iceluy, la basse cour au-devant dudit donjon et un pont levy à l'entrée d'icelle, le tout entouré de fossés ; le jardin joignant ledit château du costé du levant, enclos de murailles; un collombier sur le bout dudit jardin, un grand enclos joignant ledit château du costé du midy et couchant, contenant ledit enclos environ trente sept journaux tant de prey que terre".

Louis II de Pernes mourut sans enfant en 1719. Le 20 juin 1719, Claude de Sennevoye sa veuve et donataire universelle faisait reprise de fief et donnait dénombrement du comté et seigneuries d'Epinac et Cheilly. Par vente ou héritage, le comté d'Epinac passa ensuite à la soeur aînée de Louis de Pernes, Gabrielle, qui avait épousé Roger de Clermont-Tonnerre. Leur fils, Gaspard, né en 1688, fut maréchal de France en 1747 et mourut en 1781. Epinac resta aux Clermont-Tonnerre jusqu'à la Révolution. On trouve aux Archives de Saône et Loire (registre Q 56, acte 16) un procès-verbal d'adjudication, en date du 28 février an VIII, à Jean-Baptiste Coste, propriétaire à Chalon, moyennant 151.000 livres, du château d'Epinac confisqué sur l'émigré Clermont-Tonnerre. Le cy-devant château comprenait : "un corps de bâtiment duquel dépend deux écuries pour les chevaux, deux chenils pour les chiens, deux chambres de cochers au-dessus desdits chenils, fenil et grenier au-dessus du tout ; deux tours rondes à trois étages ; portail où fut un pont-levis, chambre au-dessus du portail, un autre corps de bâtiment consistant en une grange, une écurie et remise... un pont en pierre, servant d'entrée au cy-devant château, une tour quarrée servant d'entrée, à cinq étages, meurtrières au-dessus, vestibul, puit à côté où se trouve le chemin d'une cy-devant citerne; un autre corps de bâtiment joignant ladite tour au-dessous duquel sont quatre caves voûtées... une tour quarrée appellée la tour des farines, à quatre étages et les greniers... un autre corps de bâtiment... une autre tour quarrée à trois étages... un petit bâtiment... une tour ronde où furent les anciennes prisons, cinq étages au-dessus y compris les greniers... ce château a été dévasté ; il est dans un état de dépérissement qui le rend presqu'inhabitable...". Après la Révolution, le château appartint encore aux frères Samuel et Aaron Blum, qui possédaient la verrerie et la houillère d'Epinac. Après leur mise en faillite, il fut remis en vente et passa ensuite à différents propriétaires qui eurent à coeur d'éviter sa ruine et sa démolition, lesquelles parurent, à certaines époques, presqu'inéluctables.

Bibliographie

Courtépée, Description du duché de Bourgogne, II, p.569.

Bulliot, Essai historique sur l'abbaye de St.Martin,1849, II, chartes n°26 - 43bis et 61

H. Abord, Histoire de la Réforme et de la Ligue,I, 1855, p.32 ;II, 1881, p. 142 et s. 154-155 ; 280-281

Lavirotte, Monographie sur Monestoy, A.S.E, 1860-62, p.286

G. Dumay, Compte rendu d'excursion à Epinac, C.S.F, 42ème session, Autun, 1877, I, p.129

G. Dumay, Etat militaire et féodal....en 1474, MSE, XI, 1882, p.161

Paul Muguet, le Prieuré du Val St.Benoit, MSE, XXXVIII, 1900, p.165-166

BSE : Série I dossier Epinac

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© Roland Niaux, 2008

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