Léon
Trotsky : La Philosophie bonapartiste de l’État
(1er
mai 1939)
[Source
Léon Trotsky, Œuvres 21, avril
1939 à septembre 1939.
Institut Léon Trotsky, Paris 1986, pp. 144-151,
voir
des
annotations
là-bas]
L'élément
central du rapport de Staline devant le 18e
congrès
du parti qui s’est tenu à Moscou, a été, sans aucun doute, la
présentation d’une nouvelle théorie de l’État. Ce n’est pas
un penchant inné qui a poussé Staline à se risquer dans ce
domaine, mais la nécessité. Les fidèles staliniens Krylenko et
Pachoukanis, deux juristes, viennent tout juste d’être destitués
et écrasés pour avoir répété l’idée de Marx, Engels et
Lénine, selon laquelle le socialisme signifie le dépérissement
progressif de l’État. Le Kremlin, aujourd’hui ne peut en aucun
cas admettre cette théorie. Déjà dépérir ? La bureaucratie
s’apprête justement à vivre ! Krylenko et Pachoukanis sont à
l’évidence des « saboteurs ».
Mais
la réalité ambiante, elle aussi, s’accommode mal des bribes de la
vieille théorie. Les ouvriers sont enchaînés aux usines, les
paysans sont enchaînés aux kolkhozes ; les passeports intérieurs
ont été institués. La liberté de mouvement a été abolie. Les
retards au travail sont assimilés à des crimes de droit commun. Ce
n’est pas seulement le fait de critiquer Staline, mais simplement
celui de ne pas remplir son devoir naturel : ramper devant le « chef
», qui appelle le châtiment réservé aux traîtres. Les frontières
de l’État sont entourées d’une chaîne continue de troupes
garde-frontières et de chiens policiers, comme jamais et nulle part
dans le monde. On ne laisse pratiquement entrer ni sortir personne.
Les étrangers arrivés jadis dans le pays sont systématiquement
exterminés. L’essence de ta constitution soviétique, « la plus
démocratique du monde », consiste en ceci que les citoyens sont
obligés de voter à heures fixes pour un candidat unique désigné
par Staline ou par ses agents. La presse, la radio, la propagande,
l'instruction publique sont entièrement entre les mains de la clique
dirigeante. D’après les informations officielles, on a exclu du
parti, en cinq ans, plus d’un demi-million de personnes. Combien
d’entre elles ont-elles été fusillées, jetées en prison, en
camp de concentration, exilées dans des zones lointaines ? Nous ne
le savons pas avec précision. Mais il s’agit en tout cas de
centaines de milliers de personnes qui partagent le sort de millions
de sans-parti. A ces millions de gens, à leurs familles, parents et
amis, il serait difficile de faire entrer dans le crâne que l’État
stalinien dépérit. Au contraire, il se manifeste avec une intensité
féroce, sans exemple dans l’histoire de l’humanité.
Cependant,
on annonce que le socialisme est réalisé. D’après la thèse
officielle, le pays est sur le chemin de la réalisation complète du
communisme. S’il est quelqu’un pour en douter, Beria le
convaincra. Mais on trouve là le fondement d’une autre difficulté.
Si l’on en croit Marx, Engels et Lénine, l’État est
l’organisation de la domination de classe. Il y a longtemps que le
marxisme a démasqué toutes les autres définitions de l’État,
comme falsifications théoriques destinées à masquer les intérêts
des exploiteurs. Dans ce cas, que signifie l’État dans un pays ou
« les classes ont été supprimées »? Les sages du Kremlin se sont
bien souvent creusé la tête sur cette question. Pour commencer, ils
ont bien sûr arrêté tous ceux qui leur rappelaient la théorie
marxiste de l’État. Mais cela seul ne suffisait pas. Il était
nécessaire de donner ne serait-ce qu’un semblant d’explication
théorique de l’absolutisme stalinien. Ces explications ont été
données à deux reprises. A l’époque du 17e
congrès, il y a cinq ans, Staline et Molotov expliquèrent que
l’État policier est nécessaire pour mener la lutte contre les
vestiges des vieilles classes dominantes, et en particulier contre
les « résidus » du trotskysme. En vérité, ont-ils dit, ces
vestiges et ces résidus sont infimes. Mais ils font preuve d’un
extrême « acharnement ». C’est pourquoi il faut mener contre
eux, avec la plus extrême vigilance, une lutte sans merci. Cette
théorie a frappé surtout par sa stupidité. Pourquoi la lutte
contre des « vestiges » insignifiants a-t-elle nécessité l’État
totalitaire, alors que la démocratie soviétique a été tout à
fait suffisante pour renverser les classes dominantes elles-mêmes?
Personne n’a éclairci ce point.
Cependant,
nous avons été amenés à nous arrêter sur cette théorie,
présentée à l’époque du 17e
congrès. Les cinq dernières années ont été consacrées dans une
large mesure à l’extermination des « résidus du trotskysme ».
Le parti, le gouvernement, l’armée, la diplomatie ont été
décapités et saignés à blanc. On est allé si loin, qu’au
dernier congrès du parti, Staline a été obligé, pour apaiser son
propre appareil, de promettre qu’à l’avenir on n’aurait pas
recours à des purges sommaires. Bien entendu, c’est faux : l’État
bonapartiste sera même désormais contraint de dévorer la société,
pas seulement moralement, mais aussi physiquement. Cependant, Staline
ne peut l’avouer. Il jure que les purges ne se renouvelleront pas.
Mais alors, si les « résidus » du trotskysme et les « vestiges »
des anciennes classes dominantes sont totalement exterminés, une
question se pose : pour lutter contre qui l’État est-il nécessaire
?
A
cela Staline répond : « C’est l'environnement capitaliste et les
dangers qui en découlent pour le pays du socialisme qui appellent la
nécessité de l’État. » Dans le style monotone du séminariste
qui lui est propre, il répète cette idée, en présente des
variations sur divers modes : « La répression militaire dans le
pays est une fonction caduque, morte… La défense militaire du pays
contre l’agression extérieure est une fonction qui a été
totalement conservée. Et plus loin : « En ce qui concerne notre
armée, les organes de répression et de renseignement, leur pointe
est désormais dirigée non plus vers l’intérieur du pays, mais
vers l’extérieur, contre l’ennemi extérieur. »
Admettons
un instant qu’il en est bien ainsi. Admettons que la nécessité de
conserver et de renforcer l’appareil bureaucratique centralisé est
due exclusivement à la pression de l’impérialisme. Mais l’État
est, dans son essence même, le pouvoir de l’homme sur l’homme.
Le socialisme a pour tâche de liquider, sous toutes ses formes, le
pouvoir de l’homme sur l’homme. Si l’État est non seulement
conservé, mais renforcé, s’il devient de plus en plus féroce,
cela signifie que dans l’environnement capitaliste, le socialisme
n’est pas possible dans un pays isolé. Ainsi, en s’efforçant de
dérober la queue, Staline s’est empêtré le nez… En justifiant
son pouvoir bonapartiste, il réfute au passage sa théorie
fondatrice : la théorie de la construction du socialisme dans un
seul pays.
Cependant
la nouvelle théorie de Staline n’est juste que dans sa réfutation
de l’ancienne théorie ; pour le reste, elle ne vaut rien. Il va de
soi que, pour combattre le danger impérialiste, l’État ouvrier a
besoin d’une armée, d’un état-major, de services de
renseignements, etc. Mais cela signifie-t-il que l’État ouvrier a
besoin de colonels, de généraux, de maréchaux, et des
appointements et privilèges correspondants? Le 31 octobre 1920,
alors que l’Armée rouge — une Armée rouge Spartiate — ne
possédait pas encore de corps spécialisé d’officiers, on disait
dans un ordre du jour spécial : « L’inégalité existe dans
l’organisation militaire ; dans certains cas elle est parfaitement
explicable, et inévitable, mais dans d’autres circonstances, elle
n’est absolument pas nécessaire, exorbitante, et parfois tout
simplement criminelle. » La conclusion de cet ordre du jour était
la suivante : « Sans se fixer la tâche impossible d’éliminer
sur-le-champ tous les avantages, quels qu’ils soient, dans l’armée,
il faut s’efforcer systématiquement de réduire ces avantages au
minimum réellement indispensable. Il faut éliminer dans les plus
brefs délais tous les avantages qui ne découlent nullement des
nécessités de l’activité militaire, et blessent inévitablement
le sentiment d’égalité et de camaraderie dans l’Armée rouge. »
Telle était l’orientation fondamentale du pouvoir soviétique
pendant cette période. La politique actuelle a pris une direction
exactement inverse. Alors, si la caste dirigeante, militaire et
civile, croît et se renforce, cela signifie que la société
s’éloigne de l’idéal socialiste au lieu de s’en rapprocher,
quels que soient les coupables de cet état de choses : impérialistes
étrangers ou bonapartistes nationaux.
Il
en va de même des services de renseignements, dans lesquels Staline
voit la quintessence de l’État. Devant le congrès, dont les
agents du G.P.U, constituaient quasiment la majorité, il fit ce
sermon : « Les services de renseignements sont indispensables pour
attraper et châtier les espions, les assassins, tes saboteurs,
introduits dans notre pays par les services étrangers. » Nul ne
contestera, bien sûr, la nécessité d’un service de
renseignements pour contrecarrer les menées de l’impérialisme.
Mais tout le problème est de savoir quel est le rôle de ces
services de renseignements vis-à-vis des citoyens soviétiques
eux-mêmes. Une société sans classes est forcément soudée par une
solidarité interne. Cette solidarité, le fameux « monolithisme »,
Staline en a parlé souvent dans ses rapports. Or les espions, les
saboteurs, ont besoin d’une couverture, d’un milieu favorable.
Plus la solidarité de la société et son attachement au régime
existant sont forts, moins les éléments anti-socialistes ont le
champ libre. Comment expliquer alors, qu’en U.R.S.S., si l’on en
croit Staline, il se commet à chaque instant des crimes plus graves
que dans la société bourgeoise en putréfaction ? Il ne suffit
sûrement pas de mettre en cause la seule méchanceté des États
impérialistes ! L’action des microbes dépend moins de leur
virulence que de la capacité de résistance de l’organisme. De
quelle façon, dans une société socialiste « monolithique », les
impérialistes ont-ils pu trouver un nombre incalculable d’agents,
et de plus, aux postes les plus en vue ? En d’autres termes :
comment des espions et des terroristes peuvent-ils, dans une société
socialiste, occuper les postes de membres, et même de chef du
gouvernement, de membres du bureau politique, ainsi que les plus
hautes responsabilités dans l’armée ? Enfin, si la société
soviétique est à ce point privée de ressort qu’il faut pour la
sauver recourir à un système policier tout-puissant, universel et
totalitaire, la situation est fort compromise, car à la tête du
système policier lui-même on trouve des bons à rien, qu’il faut
fusiller, comme Iagoda, qu’il faut chasser ignominieusement, comme
Ejov. Alors à qui se fier? A Beria? Mais son heure sonnera aussi !
En
réalité, on sait que le G.P.U. extermine non pas des espions ni des
agents de l’impérialisme, mais les adversaires politiques de la
clique dirigeante. Staline s’efforce de promouvoir les faux de son
cru à la hauteur de « théorie ». Mais de quelle nature sont les
raisons qui obligent la bureaucratie à masquer ses buts réels, et à
appeler « espions étrangers » ses adversaires révolutionnaires ?
L’environnement capitaliste n’explique pas ces falsifications.
Les raisons doivent être d’ordre interne,
c’est-à-dire qu’elles tiennent à la structure même de la
société soviétique.
Essayons
de trouver chez Staline lui-même d’autres indications. « A la
place de la fonction de répression, dit-il sans aucun rapport avec
tout le reste, une fonction de protection de la propriété
socialiste est apparue dans le cadre de l’État. Protection contre
les voleurs, les pilleurs des biens du peuple. » Il s’avère donc
que l'État n’existe pas seulement pour combattre les espions
étrangers, mais aussi ses propres voleurs ; en outre, le rôle de
ces voleurs est si important qu’il justifie l’existence d’une
dictature totalitaire, et constitue même le fondement d’une
nouvelle philosophie de l’État. Il est parfaitement évident que
si des gens en volent d’autres, cela signifie qu’une cruelle
pénurie règne encore dans la société, ainsi qu’une inégalité
criante qui incitent au vol. Nous approchons là à la racine du
problème. L’inégalité sociale et la pénurie sont des facteurs
historiques très importants qui expliquent à eux seuls l’existence
de l’État. L’inégalité a toujours besoin d’être protégée,
les privilèges exigent d’être défendus. Les infractions commises
par les déshérités appellent le châtiment : c’est bien en cela
que consiste la fonction historique de l’État !
En
ce qui concerne la structure de la société « socialiste », le
plus important dans le rapport de Staline, ce n’est pas ce qu’il
a dit, mais ce sur quoi il s’est tu. Le nombre des ouvriers et des
employés est passé, selon ses déclarations, de 22 millions de
personnes en 1933 à 28 millions en 1938. La catégorie des «
employés » englobe ici non seulement les employés de coopératives,
mais aussi les membres du Conseil des commissaires du peuple. Les
ouvriers et les employés sont ici mélangés, comme toujours dans
les statistiques soviétiques, afin de ne pas dévoiler combien la
bureaucratie est nombreuse, combien elle croît rapidement, et
surtout, combien ses revenus augmentent.
En
cinq ans, dans l’intervalle entre deux congrès, le fonds annuel
des salaires des ouvriers et employés est passé de 35 milliards à
96 milliards, c’est-à-dire qu’il a presque été multiplié par
trois (si on néglige la différence de pouvoir d’achat du rouble).
Mais comment se répartissent ces 96 milliards entre les différentes
catégories d’ouvriers et d’employés? Là-dessus, pas un mot.
Staline nous apprend seulement que « le salaire annuel moyen des
ouvriers de l’industrie, qui était du 1513 roubles en 1933 et
passé à 3447 roubles en 1938. » Ici, on parle tout à coup
d’ouvriers;
mais il n’est pas difficile de démontrer qu’on parlait jusque-là
d’ouvriers et d’employés : il suffit de multiplier le salaire
annuel moyen (3447 roubles) par le nombre total d’ouvriers et
d’employés (28 millions) et nous obtenons le fonds annuel total
des salaires des ouvriers et employés indiqué par Staline, soit
exactement 96 milliards de roubles. Afin d’enjoliver la situation
des ouvriers, le « guide » s’autorise donc une astuce grossière,
que le moins consciencieux des journalistes capitalistes aurait honte
d’employer. Le salaire annuel moyen à 3447 roubles (en négligeant
les modifications du pouvoir d’achat de la monnaie) cela signifie
simplement que, si l’on additionne les salaires des manœuvres, des
ouvriers qualifiés, des stakhanovistes, des ingénieurs, des
directeurs de trusts et ceux des commissaires du peuple à
l’industrie, on obtient, par tête, moins de 3 500 roubles par an.
De combien a augmenté, en cinq ans, la rémunération des ouvriers,
ingénieurs et cadres supérieurs ? Que touche actuellement, par an,
un manœuvre? Pas un mot de tout cela. Les mauvais apologues de la
bourgeoisie ont toujours été entichés de moyennes : moyenne des
salaires, des revenus, etc. Dans les pays civilisés, cette méthode
est pratiquement abandonnée, car elle ne peut plus tromper personne.
En revanche, cela reste la méthode favorite au pays où le
socialisme est réalisé, où les relations sociales sont censées se
distinguer par une complète transparence. « Le socialisme, c’est
rendre des comptes » a dit Lénine. « Le socialisme, c’est le
rideau de fumée », enseigne Staline.
Mais
attention, ce serait une grossière erreur de croire que le chiffre
moyen donné par Staline inclut tous
les revenus des « employés » de rang élevé, c’est-à-dire de
la caste dirigeante. En réalité, en plus du traitement officiel,
relativement modeste, ceux qu’on nomme les « travailleurs
responsables » reçoivent un traitement secret des caisses du Comité
central ou de comités locaux ; ils profitent de voitures mises à
leur disposition (il existe même des usines spéciales qui
produisent des voitures de qualité supérieure pour les «
travailleurs responsables »), d’appartements magnifiques, de
datchas, de maisons de repos et d’hôpitaux. Pour leurs besoins, ou
pour leur vanité, on construit toutes sortes de « palais
soviétiques ». Ils ont un quasi-monopole sur les établissements
d’enseignement supérieur, sur les théâtres, etc. Tous ces
revenus immenses (qui pour l’État sont des dépenses) ne sont
naturellement pas pris en compte dans les 96 milliards dont parle
Staline. Malgré cela, Staline n’ose même pas aborder la question
de la répartition de ce fonds légal des salaires (96 milliards)
entre les ouvriers et les employés, entre les manœuvres les
stakhanovistes, entre les petits et les hauts fonctionnaires. Il ne
fait pas de doute que dans cet accroissement du fonds officiel des
salaires, la part du lion est allée aux stakhanovistes, que les
primes vont aux ingénieurs, etc. En manipulant les chiffres à
l’aide de moyenne, dont la justesse même est douteuse, en
réunissant en une seule catégorie les ouvriers et les
employés,
en métamorphosant en employés les bureaucrates de haut rang, en
taisant l’existence de fonds secrets fabuleux, en « oubliant »
dans la définition du « salaire moyen » de mentionner les employés
et en ne parlant que des ouvriers, Staline poursuit un but très
simple : tromper les ouvriers, tromper le monde entier, en
dissimulant les revenus colossaux et toujours croissants de la caste
de privilégiés.
«
La défense de la propriété socialiste contre les voleurs et les
pilleurs » signifie neuf fois sur dix la défense des bénéfices de
la bureaucratie contre l’agression des couches non privilégiées.
Il n’est pas sans intérêt d’ajouter que les revenus secrets de
la bureaucratie ne sont fondés ni sur les principes du socialisme,
ni, non plus, sur les lois du pays, et qu’ils ne sont rien d’autre
que du vol. Outre ce vol légalisé, il y a un super pillage illégal
sur lequel Staline est obligé de fermer les yeux, car les voleurs
sont son meilleur soutien. L’appareil
d’État bonapartiste est donc l’organe chargé de la défense des
bureaucrates-voleurs et pilleurs de biens du peuple.
Cette formulation théorique sera beaucoup plus proche de la vérité.
Staline
est obligé de mentir sur la nature socialiste de son État pour la
même raison qui l’oblige à mentir sur le salaire des ouvriers :
dans l’un et l’autre cas, il se conduit comme le représentant
des parasites privilégiés. Dans un pays qui a connu une révolution
prolétarienne, il est impossible de cultiver l’inégalité, de
créer une aristocratie, d’accumuler des privilèges autrement
qu’en déversant sur les masses des torrents de mensonges et une
répression toujours plus monstrueuse.
Le
pillage et le vol, sources fondamentales des bénéfices de la
bureaucratie, ne sont pas un système d’exploitation au sens
scientifique du terme, une classe possédante. C’est précisément
le fait qu’elle ne repose pas sur des rapports de classes —
ce
que les bases sociales de la révolution d’Octobre rendent
absolument impossible — qui donne à l’activité de la machine
d’État son caractère convulsif. Pour que la bureaucratie puisse
continuer à voler systématiquement, son appareil d’État est
contraint de recourir systématiquement à des actes de brigandage.
Tout cela ensemble crée un système de gangstérisme bonapartiste.
Croire
que cet
État pourrait « dépérir » pacifiquement, ce serait nager en
plein délire théorique. Il faut abattre la caste bureaucratique.
L’État soviétique doit renaître. Alors seulement, sera ouverte
la perspective du dépérissement de l’État.