Les débuts chez Renault
Issu
d’une famille d’enseignants, Philippe Ventre, après un Bac Philo,
choisit de faire des études d’ingénieur à l’ESTACA car il était déjà
passionné par l’automobile.
Il
entre chez SIMCA comme ingénieur à l’emboutissage. L’ambiance n’y étant
pas très bonne, il postule chez Renault et entre en 1956 au Bancs
d’essai Moteurs à Billancourt. Puis, en 1959, il arrive à Rueil aux
Essais d’Organes Véhicules. Dans ces deux premiers postes, alors que
l’on ne fait encore que des essais de moteurs ou d’organes véhicules
complets (jusqu’à la casse !), il met au point les premiers bancs
d’essai de composants moteurs (soupapes…) ou véhicules (suspensions,
portes…).
La sécurité automobile
Dans
les années 1960, la conception de la caisse des voitures est encore
essentiellement une affaire de style. En 1970, Yves Georges confie à
Philippe Ventre la responsabilité d’un nouveau service chargé d’étudier
la caisse sous l’angle de sa résistance et de la sécurité. Jacques
Lacambre rejoint ce service.
Ce
sont les premiers travaux avec le Docteur Tarière (Laboratoire de
Physiologie et de Biomécanique). On commence à mieux comprendre les
réactions de la voiture, mais aussi de ses occupants dans les accidents
grâce à des essais de chocs et aussi aux enquêtes menées avec la
gendarmerie lors d’accidents.
Au
début des années 1970, il y des débats vifs sur les normes de sécurité
avec les américains, tenants de voitures rigides et lourdes. L’équipe de
Philippe Ventre montre aux américains que rigidité et lourdeur des
voitures ne sont pas la solution. En effet, comme le montre
spectaculairement le film de l’époque présenté par Philippe Ventre, un
choc entre une R5 « renforcée » et une Ford Zephyr « assouplie » montre
une protection des occupants très supérieure à celle obtenue lors du
choc entre les mêmes véhicules « de série ». On a d’ailleurs encore
demandé à Philippe Ventre, il y a quelques années, de présenter ces
résultats très importants dans des conférences sur la sécurité
automobile..
Puis,
c’est le programme « Basic Research Vehicle » sur la sécurité avec les
premiers prototypes de prétensionneurs sur les ceintures de sécurité.
Renault va devenir un leader reconnu en matière de sécurité.
AMC
En
1979, Renault vient de prendre une participation dans AMC. A la demande
de Pierre Tiberghien, Directeur des Etudes, Philippe Ventre va prendre
en charge à Détroit, le projet Alliance, version américaine de la R9. Il
est nommé Executive Vice-President, General Manager Engineering and
Planning Group de Renault USA. Il garde le souvenir d’une préparation
minimaliste de son arrivée. Son rattachement à la Direction des Affaires
Internationales ne facilite pas les relations avec ses collègues du
central.
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Première surprise : les importants travaux de mise aux normes US des
plans de la R9 face à l’avalanche des modifications techniques venues de
France. Puis, des discussions difficiles avec le Bureau d’Etudes
Moteurs central sur les techniques moteur à retenir pour respecter les
normes de consommation US. Malgré ces difficultés, l’Alliance sort en
juillet 1982 juste un an après la R9 en France, les normes de
consommation sont respectées au-delà des espérances (43 miles par
gallon) et l’Alliance est élue « Véhicule de l’Année » aux USA. Renault a
alors acquis la majorité d’AMC, José Dedeurwaerder en est Directeur
Général, et Philippe Ventre en est Vice-président « Product Engineering
and Development ».
Cette période au cœur de l’automobile américaine reste un très bon souvenir.
Le retour en France
Philippe Ventre est rappelé en France en 1984. Il livre quelques souvenirs marquants :
- le problème sur l’essieu arrière de la R21 qu’il faut régler en moins de 6 mois pour le démarrage aux congés 1985.
-
la décision de Raymond Lévy de décaler la sortie de la R19 pour obtenir
un niveau de qualité correct dès la sortie. Une première chez Renault.
-
les évolutions de l’organisation du développement véhicules : structure
projet ou structure métier (Philippe Ventre considère qu’il faut
absolument préserver la culture métier et l’expérience) ; et la
décision finale d’une structure matricielle.
Philippe Ventre est nommé Directeur des Etudes en 1989.
La création de l’Ingénierie
Le
regroupement Etudes Méthodes pour former une Ingénierie Produit Process
est un signal fort de la nécessaire coopération entre ces 2 directions
pour progresser en matière de délais de développement. Renault est un
des premiers en Europe. La grande taille de l’entité obtenue conduit à
un découpage Ingénierie Véhicule (Philippe Ventre est nommé Directeur de
l’Ingénierie Véhicules en 1994) et Ingénierie Mécanique. Cela a été
bien expliqué et l’opération s’est plutôt bien déroulée dans un premier
temps. Mais cela met en évidence des différences pratiques sur le mode
de management des équipes (assez souple au BE, plus rigide aux Méthodes)
qui se traduisent très concrètement par des différences sur les
feuilles de paie. On annonce aussi le déménagement au Technocentre à
Guyancourt. Une grève démarre à Rueil en 1995 qu’il sera bien difficile
d’arrêter. C’est une action violente menée par certains syndicalistes de
Billancourt sur le site de Rueil, mal vécue par les techniciens de
Rueil, qui aboutira à l’arrêt du mouvement de grève.
Mais on en tirera les leçons : le déménagement à Guyancourt se déroulera très correctement.
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Pour conclure
Philippe Ventre aura passé 42 ans chez Renault. Il rappelle 2 points essentiels :
- Chez Renault, on se retrousse les manches quand il y a un problème. Il faut s’attacher à conserver cet esprit de corps.
- Il faut préserver la culture du métier automobile, c’est la base pour ne pas faire d’erreurs !
Enfin la séance habituelle de questions/ réponses a d’abord l’occasion de revenir sur :
-
la période Renault-Volvo avec la réalisation de la plateforme commune
P4 malgré les difficultés (logiciels CAO différents, organisation,
rivalités)
-
les travaux du CCMC sur les futures réglementations européennes
(difficile, mais très bon souvenir des relations avec le Docteur
Seiffert de VW)
Cela a aussi permis de découvrir d’autres aspects de Philippe Ventre :
-
Président du club de karting du COB dans les années 60. Cela lui a
permis de cultiver sa connaissance des moteurs 2 temps, ce qui fut bien
utile ultérieurement lorsque Renault a envisagé cette solution.
-
Maire de sa commune depuis 2008, et maintenant confronté aux méandres
de l’administration d’état pour le bien de ses administrés.
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